LE DISCOURS D'UN ROI
L'élégance d'un favori aux Oscars
Le film de Tom Hooper arrive en France avec sa réputation déjà prestigieuse. Prix du public à Toronto en 2010, « Le discours d'un Roi » dispose déjà de 14 nominations aux Baftas (les oscars britanniques) et fait figure de favori pour les prochains Oscars. Il a également valu le Golden globe du meilleur acteur à Colin Firth, un an à peine après son oscar pour « A single man ». Tout cela impressionne forcément. Mais est-ce que le nouveau Studio des frères Weinstein, « The Weinstein company » tient là sa véritable première consécration ? Pas si sûr, car en face se profilent « The social network », « Inception », « Black swan » et « The fighter »...
Bref, revenons à nos moutons, et à ce qui nous intéresse ici: « Le discours d'un Roi ». Le film, agréable à l'oeil comme à l'oreille, est d'une facture plutôt classique. Film en costumes, situé dans l'Angleterre des années 30, au cœur des arcanes du royaume, entre intrigues (légères) et bienséance. Après une scène d'ouverture durant laquelle le malaise du futur roi est plutôt bien retranscrit, grâce à l'alternance de plans larges en légère plongée sur une foule en expectative, et de gros sur le terrifiant micro et le visage rougit de Colin Firth, le scénario se centre dans un premier temps sur l'entourage de Georges. Hormis sa tendre épouse (Helena Bonham Carter, toujours attachante), il y a les médecins incapables de guérir Georges de son « infirmité », mais qui tentent toutes sortes de méthodes ridicules, donnant lieu au passage à quelques scènes comiques.
Le tournant arrive rapidement avec la rencontre informelle avec cet étrange médecin qui exerce dans une cave défraichie et semble ne faire aucun cas des particularités inhérentes à la famille royale (Geoffrey Rush). Puis se dévoile peu à peu le personnage du futur roi. Tour à tour infirme désabusé, prince prétentieux, père aimant, aristocrate dédaigneux, homme du peuple responsable, gamin peureux, il permet une nouvelle fois à Colin Firth de démontrer l'étendue de son talent. L'acteur, n'en faisant pas trop dans l'handicap d'élocution, est d'ailleurs certainement déjà en route pour un nouvel oscar du meilleur acteur, grâce à son juste équilibre entre honte dissimulée, fierté et colères monumentales du fait d'une impuissance à surmonter son bégaiement et ses angoisses de prise de parole en public.
Le metteur en scène, lui, évite les moments officiels, son film restant pertinemment dans le domaine de l'intimité, dont le secret sied bien à la charge qui attend le personnage principale (son frère, Edouard VIII choisissant l'amour à son devoir d'homme public. Il préfère s'attarder sur la déclaration au peuple aux premiers temps de la deuxième guerre mondiale, plutôt que sur le couronnement en grandes pompes. Le choix est judicieux et l'on s'attache vite à ces personnages, le récit se transformant en une relation complice entre « conseiller » et « homme (politique) », de l'ordre du mentor – disciple ou ami – patron. Un beau portrait du futur Roi Georges VI, entre comédie intimiste et film politique, qui prend une dimension très actuelle dans son traitement de la transformation de la charge publique avec l'avènement des masses médias (ici la radio).
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur