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Festival
Festival de Cannes 2022 : trajectoire vers la folie avec "La Femme de Tchaïkovski"
Compétition
LA FEMME DE TCHAÏKOVSKI
(Zhena Chaikovskogo)
de Kirill Serebrennikov
avec Yuliya Aug, Odin Lund Biron, Alyona Mikhailova…
Notre première impression sur le film :
Présent sur les marches cette année, le réalisateur russe dissident Kirill Serebrennikov, privé de venue à Cannes pour "La Fièvre de Petrov" l’an dernier car assigné à résidence, a donc pu assister à la projection de son nouveau long métrage, "La Femme de Tchaïkovski". S’étalant sur près de 25 ans, l’intrigue du film suit le parcours de celle qui épousa le célèbre compositeur Piotr Tchaïkovski, prête à tout pour rester aux côtés de cet homme, malgré les pires humiliations et surtout l’absence d’amour. S’ouvrant sur une scène onirique, où le corps sans vie de l’artiste se réveille pour dire à cette femme « Je te hais », le film se clôt également par un sublime plan séquence dansé, signifiant à la fois l’enfermement de cette femme dans sa logique mortifère et sa lente descente vers la folie.
L’actrice principale, Alyona Mikhailova, est tout juste impressionnante dans ce rôle qui exige à la fois une part de naïveté affichée, mais aussi une détermination se muant ponctuellement en colère. Rendant clinique une approche amoureuse à la fois irrationnelle et s’apparentant d’emblée à un arrangement que l’on négocie à la manière d’un entretien d’embauche, le scénario de Kirill Serebrennikov ne quitte ensuite jamais le point de vue d'Antonina, confrontée aux reculades d’un mari qui cache son homosexualité et pas sa répugnance. Mais le point fort du film est à nouveau sa mise en scène, l’auteur soignant ses cadres, millimétrés, dans une gamme de couleurs éteintes, et enchaînant plans zénithaux, plans séquences, et autres dispositifs où la position des corps est chaque fois mûrement réfléchie. Si le prix de la mise en scène lui échappe encore cette année, un prix pour l’actrice principale serait sans doute un beau lot de consolation.