Festival de Cannes 2015 : "La loi du marché", vision abrupte et épurée du monde du travail par Stéphane Brizé

Compétition
LA LOI DU MARCHÉ
de Stéphane Brizé
avec Vincent Lindon, Yves Ory, Karine De Mirbeck...

Stéphane Brizé, qui avait été révélé dans les années 90 à la Quinzaine des réalisateurs avec "Le bleu des villes" revient enfin à Cannes, catapulté en compétition. Avec tout le tact qu'on lui connaît, il aborde les difficultés de la réinsertion et la dureté du monde du travail avec une acuité toute particulière. Et il offre au passage un très beau rôle à Vincent Lindon, en chômeur de près de 20 mois qui finit par retrouver un travail de vigile en supermarché.

Par petite touches, ne ménageant pas le nombre d'ellipses, il gratte là où ça fait mal, décrivant l'humiliation forcée que représentent les formations mal ciblées ou l’entraînement aux entretiens d'embauche (la très crispante scène de la critique collective d'une vidéo d'entretien est tout simplement remarquable...), ainsi que la valse des vautours, qu'il s'agisse de particuliers profitant de la détresse du couple (la formidable scène de négociation du prix du mobil-home...) ou des banquiers, qui sans vergogne continuent à proposer des produits de placement quand la situation n'est déjà pas au beau fixe.

Évitant malheureusement de développer plus avant les difficultés du couple, quant au placement de leur enfant handicapé, et souffrant paradoxalement de quelques scènes peu utiles (le cours de danse...), "La loi du marché" vise cependant juste et fustige un patronat et un encadrement hypocrites qui prennent leurs responsabilités uniquement quand cela les arrange. Un film âpre qui lorgne du côté des Dardenne, tout en trouvant sa propre identité.