Festival Que du feu 2024 encart

INTERVIEW

LIL'BUCK REAL SWAN

Louis Wallecan

réalisateur

Louis Wallecan vient de la musique classique. Il a travaillé sur la figure de Verdi et c’est un grand amateur d’opéra italien. Il a travaillé avec le chorégraphe Benjamin Millepied pendant son temps à l’Opéra de Paris où il fit la captation de plusieurs ballets. C’est également un documentariste aguerri qui a tourné dans plusieurs pays.

Entretien Lil'Buck Real Swan film affiche
© Sophie Dulac Distribution

Il nous explique que ce documentaire est un projet qui s'est étiré sur quatre ans, quatre ans en pointillés depuis les premiers repérages jusqu’au montage final. Les images chronologiquement les plus anciennes étant celle de Lil’Buck à la fondation Louis Vuitton.

Sa méthode de travail est la suivante : construire un espace, le plus grand possible, dans lequel il va avoir une maîtrise de son sujet, tout en se laissant la place de découvrir, d’expérimenter, de tourner beaucoup et de découvrir. Il s'agit également de rester le plus ouvert possible, de se laisser surprendre et de prendre le temps d'aller à la rencontre des gens, des points de vue singuliers qui vont avoir une histoire à raconter par rapport au sujet traité.

Cette recherche documentaire se fait toujours en gardant en tête l’idée qu’une fois en salle de montage, c’est une et une seule histoire qu’il faudra raconter : ici celle de Lil’Buck, de son ascension dans le monde du jookin de Memphis à son envolée vers les cieux internationaux grâce à la danse classique.

Pour Louis Wallecan, les images d’archives sont une matière essentielle pour le documentariste, car elles permettent de raconter et de mettre en perspective. Grace à ces images, un peu « pourries », en 4/3, sur des DVD pirates, filmées par le manager de Lil’Buck, on voit l’évolution du danseur et de son monde.

Cela permet également de créer du contraste avec les images de danse plus lourdes et plus élaborées qu’il a filmées pendant ses voyages à Memphis, avec les danseurs de cette communauté. Des images plus esthétiques, plus virtuoses, plus amples, à base de plans larges et de plans-séquences qui replacent les danseurs dans leur milieu et illustrent ainsi l’idée que le jookin n’est pas seulement une danse, mais une philosophie, un chemin de vie, la cristallisation de leur quotidien, la matérialisation de leurs émotions. Un esthétisme loin d’être gratuit donc.

C’est l’idée de « raconter » qui revient le plus souvent à la bouche du réalisateur. Dans ce documentaire, les images et les gens racontent un parcours atypique, celui de Lil’Buck, mais aussi une époque et une ville. C’est pour cela que le film s’ouvre sur un lieu, le Crystal Palace Skating Ring, filmé comme un personnage, matrice de cette culture.

Ouvrir le film sur le club traduit la volonté du réalisateur d’inscrire le danseur dans son contexte et le faire émerger d’abord avec la voix, puis de faire exister l’univers qu’il va s’approprier avant de s’en extraire pour voler vers un destin plus personnel.

Louis Wallecan explique que dès le départ, il voulait faire faire un film très musical. Il a pour cela compté sur Arthur B. Gillette qui signe la bande originale. Une bande originale qui fait collaborer et se répondre le rap et le classique, témoignant de la proximité de ces arts, réunis dans la souplesse des chevilles et les mouvements gracieux du danseur.

Enfin, le réalisateur explique l’importance qu’il y avait de montrer Lil’Buck à Memphis, avec sa communauté, dans les actions qu’il mène aujourd’hui, après son accès à la renommée. Il explique que le danseur ne s’est jamais éloigné de cette ville qui l’a vu émerger et qu’il donne beaucoup en retour de ce qu’il a reçu, à travers l’académie de danse qu’il a créée et où il enseigne.

Ces valeurs de partage et de transmission, chères au réalisateur, qui estime que le rôle des artistes est de réunir les gens, de prendre le temps de les écouter et de les comprendre, sont au cœur de la philosophie du danseur et du film lui-même.

Pour conclure, Louis Wallecan annonce qu’il travaille en ce moment sur deux séries, l’une porte sur la danse et est en développement avec un producteur américain ; l’autre, également en développement, portera sur les problèmes liés au réchauffement climatique et à la bio-éthique.

Thomas Chapelle Envoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT