Festival Que du feu 2024 encart

INTERVIEW

ET PLUS SI AFFINITÉS

Wilfried Meance, Bernard Campan et Julia Faure

co-réalisateur et scénariste, acteur et actrice

Entre Xavier et Sophie c’est le train train quotidien. Plus de désir, de sexe dans leur couple. Sophie décide alors d’inviter leurs jeunes nouveaux voisins Adèle et Alban pour se changer les idées et « rencontrer de nouvelles personnes » et faire preuve « de relations de bon voisinage ». Cela n’enchante pas du tout Xavier qui subit la situation et cela le rend encore plus bougon et amer que d’habitude. Une histoire de couple qui va devoir faire face à sa réalité après 25 ans de mariage.

Rencontre captivante avec le co-réalisateur et scénariste Wilfried Méance et les comédiens Bernard Campan, Julia Faure dans les salons de l’Inter Continental de Lyon.

Entretien Interview Rencontre
© Wild Bunch Distribution

Réaliser à deux

Wilfried Méance : L’avantage qu’on a avec Olivier Ducray (co-réalisateur) c’est qu’on a des parcours un peu différents. Lui est plus sur les mots, sur la musicalité du texte, moi sur les axes de la caméra ou la direction d’acteur par exemple. Le plus aussi d’être deux quand on a quatre acteurs, c’est qu’on va plus vite : l’un va parler aux deux acteurs et l’autre va parler aux deux autres. L’important c’est de ne pas de se contredire. Et de voir le même film, de raconter la même histoire. Le secret c’est le travail de préparation avant le tournage. C’est pour cela que notre duo fonctionne si bien.

Un remake de "Sentimental"

Wilfried Méance : C’est un remake du film espagnol "Sentimental", écrit et déjà réalisé par l’espagnol Cesc Gay. Ce projet nous a été proposé par nos deux producteurs Romain Brémond et Daniel Preljoca. Il y avait plein de choses qui nous plaisaient dans la version espagnole et plein de choses où on se disait que les ressorts de la comédie n’étaient pas assez poussés à notre goût, notamment pour la fin. Nous voulions quelque chose de plus ouvert, de plus positif sur ce couple de Xavier et Sophie.

L’adaptation française

Wilfried Méance : On a écrit le scénario à trois avec Jean-Paul Battani et Olivier Ducray. On se sépare les tâches, car on a des zones de conforts qui sont complémentaires. Dans la version originale les voisins arrivent à la 26e minute, ici ils arrivent au bout de 6 minutes. On a beaucoup «resserré » de choses pour avoir du rythme. Il y a quelque chose de culturel aussi dans la version espagnole qu’on ne pouvait pas garder ici dans la version française. Par exemple, dans la version espagnole, ils ne sont pas à table comme ici à naviguer entre cuisine et salon, mais tout se passe autour d’un buffet. Nous, nous avons voulu garder la culture française, avec l’entrée, plat et gigot, permettant de rythmer certains moments.

On est trois scénaristes de différentes générations aussi. Pour le personnage de Xavier, qui a une soixantaine d’années, il nous fallait quelqu’un qui soit de la même époque avec les mêmes références culturelles. C’est donc Jean- Paul Battani qui l’a travaillé et qui lui a donné toutes ces punchlines. Les éléments ajoutés à cette adaptation sont par exemple le gigot d’agneau qui vient rythmer cette comédie, le chien Alto et cette fin au piano. Aussi on a voulu que le couple Adèle/Alban ne soit pas le couple parfait, sans faille, alors on a créé le personnage de la fille de Xavier et de Sophie pour amener aussi une confrontation dans ce jeune couple.

Julia Faure : Oui et de ne pas juste se fier aux apparences. Car même le couple qui a l’air le plus parfait ne l’est pas.

Le regard d’Adèle sur le couple de Xavier et Sophie

Julia Faure : Je pense qu’ils s’aiment et qu’il ne faudrait de pas grand-chose pour redonner un peu de peps à leur histoire. Car en tant qu’Adèle, psychologue pour chiens, je sais à quel point c’est difficile de s’étonner après 25 ans de couple. Et je voudrais qu’ils prennent le risque d’assumer un peu leur désir, qu’ils aillent un peu plus vers la folie. Et je me dis que notre couple peut être un levier pour leur couple pour repimenter leur mariage. Adèle les accompagne, écoute par pure altérité.

Bernard Campan : Ah oui c’est leur électrochoc ! Ils vont devoir s’affronter et se parler.

Le regard de Xavier sur le couple de Adèle et Alban

Bernard Campan : Pour mon personnage, Adèle et Alban est un couple qui est ensemble sur un malentendu. Mais bien sûr c’est plus subtil que ça. Car quand même sur leur libertinage ils ont l’air bien en accord. Ils ont bien défini leurs règles et cadre, mais celui-ci a été transgressé, et là on se demande si le couple sera assez solide pour résister et durer. Le film pose aussi un regard acide sur la vie à deux, les compromis qu’on est prêt à faire ou non. Le film a un fond qui est l’amour, la sexualité dans le couple, mais qui n’est pas traité frontalement. Ca parle aussi de l’usure d’un couple. Qu’est-ce que véritablement s’aimer ?

Un quatuor motivé et motivant

Julia Faure : J’ai adoré que ce soit une comédie assez adulte sur la sexualité mais qui ne tombe pas, comme le dit Bernard, dans « le côté graveleux qui reste fin, élégant et intelligent ». Qui n’enchaîne pas les vannes pour les vannes. Ca c’est un truc qui peut vraiment me déprimer dans les comédies en règle générale. Après j’étais hyper heureuse de rencontrer Bernard, Isabelle et Pablo. Le casting m’a emballée. En fait mon personnage d’Adèle me plaît dans ce contexte du groupe. J’ai été heureuse de faire partie d’un quatuaor. Le personnage en soi me fait rire, mais il existe parce que Pablo joue le mâle alpha dans toute sa splendeur, donc il me permet à moi de développer un peu plus d’autorité. Mon personnage se teinte de ce que proposent mes partenaires. Le plus gros de mon travail c’était vraiment la mémorisation. Le reste ça se crée sur le moment et c’était super jubilatoire et joyeux.

La complicité des couples

Bernard Campan : Avec Isabelle Carré on se connaît bien, car on a tourné ensemble. Donc nous avions moins de choses à faire, à créer, pour trouver notre complicité. Il fallait juste ajouter le côté usé du couple de 25 ans de vie conjugale.

Wilfried Méance : Nous, nous voulions avoir un couple de cinéma. C’est à dire un couple déjà identifié par les spectateurs, car ils les ont déjà vu ensemble dans des films et donc peuvent plus facilement s’identifier à eux.

Julia Faure : Nous, avec Pablo Pauly, nous ne nous connaissions pas, alors on a fait connaissance en amont du tournage en travaillant sur la mémorisation du texte. On se téléphonait, on allait chez l’un ou l’autre et on faisait tous les personnages. On passait des heures au téléphone... Nous avions beaucoup de complicité à rattraper par rapport au couple incarné par Isabelle et Bernard. Car dans le film ils ont 25 ans de vie commune et nous 2.

Wilfried Méance : Pour le couple interprété par Julia et Pablo, en opposition au couple Isabelle et Bernard, nous voulions des acteurs qui ne se connaissent pas , un couple nouveau, torride, pour apporter le côté jeune et frais d’un couple.

Un tournage court mais efficace

Wilfried Méance : On avait un planning serré par rapport aux disponibilités des comédiens et aussi un petit budget. Donc on a été obligé d’optimiser la préparation pour être efficace en 21 jours. D’ailleurs on leur tire notre chapeau aux quatre comédiens et à toute l’équipe, car tout le monde a été super. Chaque jour nous tournions une séquence entière de douze minutes. Ce qui est normalement un format qu’on retrouve en télé plutôt qu’au cinéma.

On a aussi tourné dans la continuité, dans l’ordre chronologique, ce qui est rare au cinéma. Ceci a permis aux comédiens un confort dans leur interprétation. Il laissait leur personnage le soir pour le reprendre le lendemain matin là où on l’avait laissé. Il nous fallait juste caler le bon niveau d’humeur, le bon ton de la veille. Tourner dans l’ordre chronologique, nous a aussi amené un confort dans le script, car nous avons eu des intuitions notamment pour la fin.

Une fin ouverte

Wilfried Méance : En fonction des retours que l’on a du public, chacun comprend cette fin à sa sauce. Tout dépend de ce qu’on est en train de traverser dans sa vie de couple. En tout cas nous, nous voulions une fin ouverte, un joli moment pour ces deux vieux amants.

Georgy Batrikian Envoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT