INTERVIEW
ALICE ET LE MAIRE
Nicolas Pariser, Fabrice Luchini et Anaïs Demoustier
réalisateur et scénariste, acteur, actriceIl y a foule dans le petit salon du Comoedia pour la venue du duo Fabrice Luchini / Anaïs Demoustier, têtes d’affiches du nouveau film de Nicolas Pariser (« Le grand jeu« ) qui a fait les beaux jours de la Quinzaine des réalisateurs en mai dernier. Et l’interview s’annonce animée.
Diriger des acteurs ?
Tous tombent d’accord sur le fait qu’ « il y a quelque chose d’irrationnel dans le talent des acteurs ». Le metteur en scène préfère parler d’un « travail ensemble » plutôt que d’une « direction d’acteurs ». Fabrice Lucchini, après avoir évoqué Raimu comme « le plus grand des acteurs, car il est organique, ne réfléchit pas », ou en plaisantant, le fait que pour Truffaut « les acteurs gros [étaient] toujours très valorisés », affirme qu’ici « c’est l’écriture qui nous met en scène ». Quant à Anaïs Demoustier, elle ajoute qu’à la lecture elle « était un peu inquiète », car « il fallait que ces mots deviennent les nôtres, que ce ne soit pas indigeste ».
Face à Lucchini ?
Bien sûr face à Lucchini, qui « prend beaucoup de place » (rires), elle était inquiète. Mais elle sait aussi que c’est « la surprise avec chaque acteur ». Lors des répétitions cela lui faisait « plaisir de voir son engagement », car « son enthousiasme autour du projet était communicatif ». Rapidement, elle a cru « complètement à son personnage d’homme politique, de Maire de Lyon » et leurs « rythmes se sont bien mariés ».
Lucchini complète ses paroles en indiquant que « tout ce qui est passionné est vécu (c’est l’époque) comme » prendre la place de l’autre. Hors à 76 ans, s’il est juste « pour lui-même », « c’est pathétique ». Être acteur selon lui, c’est avant tout « alterner la présence et la disparition ». « Un acteur n’est jamais fou », son métier est de « contrôler et de délivrer de la haine ou de l’amour à la demande ». « Être un acteur c’est un peu être sujet au désir des autres ».
Des dialogues ciselés
Pour écrire le scénario, Nicolas Pariser a « vu beaucoup de reportages », ce qui l’a « nourri inconsciemment ». Mais il lui a aussi fallu mettre de l’imagination, car il « ne s’est pas inspiré d’un homme politique en particulier ». Lucchini, s’il essaye de comprendre le monde en suivant l’actualité, avoue ne pas être passionné par la politique et ne pas non plus s’être inspiré d’un homme en particulier. Alors que pour "L’hermine", il avait par exemple observé une audition durant 10 minutes, et en avait « pris la diction lente et douce ».
Anaïs Demoustier, elle, a voulu « lire tous les livres dont sont inspirées les citations » employées dans le film. Elle souhaite bon courage aux journalistes, ne les ayant finalement pas tous lus. Quant au réalisateur, il complète en indiquant qu’il « aime la présence physique des livres dans ses films », ceux-ci amenant beaucoup à l’écriture.
La relation avec la mairie de Lyon
Nicolas Pariser aborde ensuite la relation avec la mairie de Lyon, sur laquelle beaucoup de journalistes locaux s’interrogent. Une salle avait initialement été louée (« les mairies n’ayant plus d’argent »), mais un représentant du Japon était finalement en visite le jour du tournage et la réservation a donc été annulée. Lucchini plaisante en indiquant qu’ils ont alors « été accueillis par l’opposition ». Le tournage a en effet eu finalement lieu dans les salons de la Préfecture. Le tournage dans les rues de la ville, lui, n’a pas posé de problème. Nicolas Pariser ajoute pour finir qu’il s’agissait avant tout pour lui de trouver « un mini royaume » pour son personnage de maire. « A Paris, il y a le président ». Il ne pouvait donc pas situer l’action dans la capitale, mais il aurait « aussi bien pu tourner à Bordeaux, à Lille ou à Nantes ».
Olivier Bachelard Envoyer un message au rédacteur