INTERVIEW
TRUST
Jeudi 8 septembre 2011, David Schwimmer est au Festival de Deauville pour défendre sa deuxième réalisation pour le cinéma : « Trust ». Il revient sur la genèse de ce projet et le choix de ses comédiens.
Journaliste :
D’où vous est venue l’idée et l’envie de f…
Jeudi 8 septembre 2011, David Schwimmer est au Festival de Deauville pour défendre sa deuxième réalisation pour le cinéma : « Trust ». Il revient sur la genèse de ce projet et le choix de ses comédiens.
Journaliste :
D’où vous est venue l’idée et l’envie de faire un film sur le sujet des prédateurs sexuels sur internet ?
David Schwimmer :
Cela fait quinze ans que je travaille avec l’association « The Rape organisation » à Los Angeles, où j’ai entendu de nombreuses histoires qui m’ont choqué, m’ont bouleversé et qui sont arrivées à de jeunes Américains. C’est ce qui m’a poussé à faire le film sur ce sujet. J’ai pris cette décision il y a sept ans. Mais écrire, réaliser et monter le film a pris beaucoup plus de temps que je ne le pensais. Il y a eu régulièrement des bouleversements sur internet, des nouveaux défis à relever chaque jour et on se rend compte que les policiers sont toujours deux pas derrière les prédateurs, ce qui est très inquiétant…
Journaliste :
Pourquoi ne pas avoir réalisé un documentaire ? Vous deviez avoir la matière nécessaire avec cette association que vous soutenez.
David Schwimmer :
Si je n’ai pas fait un documentaire, et dieu sait que j’aime les documentaires au cinéma, c’est parce que j’aime encore plus la forme du film de fiction. Cela me permet de me sentir encore plus impliqué dans une histoire, d’être plus proche des personnages. Et quand je me rappelle de très grands films, je me souviens d’abord de la performance des acteurs, c’est quelque chose qui me touche plus ! En outre, aux Etats-Unis, nous avons déjà beaucoup de documentaires qui traitent de ce sujet.
Journaliste :
Comment avez-vous procédé pour être au plus près de la réalité ?
David Schwimmer :
Tous les dialogues ont été vérifiés par des professionnels, des experts, des agents du FBI, des conseillers experts dans les cas de viol. Par exemple, la scène entre la famille et l’officier a été scrupuleusement écrite et contrôlée par les agents qui utilisent un langage très réfléchi, où certains mots sont bannis. Je souhaitais vraiment atteindre le degré de réalisme le plus pointu.
Journaliste :
Pour les comédiens, cela a-t-il été plus facile ?
David Schwimmer :
Avec les comédiens, nous avons lu et relu le script, déjà pour qu’ils le digèrent complètement et soient le plus naturels possible dans les scènes de dialogue. C’était aussi leur permettre d’intervenir dans le script, voire de changer certains passages qui ne leur semblaient pas appropriés. Ainsi, pour la scène du viol à l’hôtel, Liana Liberato [qui joue Annie, la jeune victime, ndlr] trouvait étrange qu’elle parle de maigreur de son corps, alors je lui ai demandé ce qu’elle aurait dit dans une situation pareille, elle m’a ainsi plutôt suggéré de parler de son « étrange » corps sans entrer dans les détails. C’est finalement cette phrase que nous avons conservée pour le film.
Journaliste :
Comment avez-vous opéré pour le casting de votre film ?
David Schwimmer :
Le rôle le plus crucial pour moi à trouver était bien entendu celui de la jeune fille. J’ai dû voir à peu près 80 auditions d’adolescentes de Los Angeles. L’une d’entre elles était Liana. Je me suis donc rendu à L.A. pour la voir, parce que je savais que ce serait elle qui aurait le rôle. Elle avait 14 ans pendant le tournage et elle a fait un travail remarquable, sa performance est admirable. A cet âge c’est simplement étonnant de la voir jouer de manière aussi juste ! Pour le prédateur, c’était également très difficile à caster. J’ai même failli le jouer moi-même. Puis, je me suis souvenu de mon ami Chris [Henry Coffey, ndlr], que j’ai choisi parce qu’il a un côté pas du tout inquiétant et c’était ce que je cherchais. En plus, il y avait une bonne alchimie entre lui et Liana, ce qui était très important pour moi.
Journaliste :
Vous dénoncez vivement les publicités qui mettent en scène des adolescents.
David Schwimmer :
Je suis choqué de voir comment de très jeunes personnes sont représentées dans de nombreuses publicités. Mon film veut éveiller les consciences sur ce que je pense être un vrai problème.
Journaliste :
Sans parler du média internet qui est la cible de votre film…
David Schwimmer :
La dépendance des jeunes aux nouvelles technologies m’inquiète fortement ! Les jeunes sont constamment devant un écran, que ce soit une télé, un ordinateur, un smartphone, et ils n’ont plus de réelles conversations. Il y a un phénomène qui est né récemment, c’est le cyberbullying : des jeunes choisissent une tête de turc pour l’humilier en le filmant et en mettant la vidéo sur YouTube, et cette humiliation ne s’efface plus, en tous cas plus dans la tête du jeune qui finit bien souvent par se suicider… De mon temps, quand on se chamaillait dans la cours de récréation, c’était juste le temps d’une brimade et on finissait pas l’oublier. Internet conserve à vie ces données de torture psychologique.