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Critique Série : VÉNUS ET APOLLON - SAISON 1
Série créée par Tonie Marshall
Avec Brigitte Roüan, Maria de Medeiros, Maëva Pasquali, Nathalie Grandhomme, Mélanie Bernier, Pascal Elso, Zinédine Soualem...
Première diffusion en France : 2005 sur Arte
Format : 26 minutes en moyenne par épisode (25 épisodes pour la saison 1)
Synopsis
Dans leur institut, quatre esthéticiennes espèrent que leurs services pourront améliorer la vie de leurs clients et clientes...
Critique : Une série au potentiel non exploité
Baser une série sur un succès ciné n'est pas nouveau même si l'inverse est plus courant. Mais comme toujours, les prétextes artistiques évoqués sonnent faux : même si ladite série passe sur Arte l'exploitation d'une franchise semble d'abord guidée par des intentions commerciales, si modestes soient les objectifs. L'acte de naissance de la série est donc rédigé sur des bases fragiles.
Cela mis à part, quelle est la volonté affichée de Tonie Marshall et de ses collaborateurs ? Se servir d'un lieu fictionnel revendiqué comme novateur (une institut de beauté pour hommes et femmes) pour explorer l'humain sous toutes ses formes. De là surgit le deuxième hic : le point de départ est sans doute à la fois trop vague et prétentieux. L'univers créé sur ces bases ne tient pas la route tant il s'ancre dans une utopie naïve, faussement intellectuelle et candidement poétique. L'absence de tout complexe de la part des créateurs permet apparemment toutes les libertés mais la volonté parfois sous-jacente de provocation ou d'innovation est bien trop gentillette – la nudité régulière à la soixante-huitarde en est un exemple.
Dans ce contexte, le ton est inégal, l'ensemble n'a pas d'âme et l'interprétation n'arrange pas les choses. Le jeu est globalement si caricatural qu'il est difficile de s'identifier aux personnages même avec les plus touchants – la charmante Bijou par exemple, ou Dan, personnage récurrent campé par l'incomparable Zinédine Soualem. La palme du pire revient sans conteste à Brigitte Roüan qui semble jouer avec des œillères, comme si elle tentait de se mettre en valeur dans un one-woman-show prétentieux et égocentrique taillé sur mesure. Son air évaporé et arrogant empêche tout connexion entre son personnage et les autres – si c'est voulu c'est terriblement agaçant ! Ajoutons à cela la succession inutile et exaspérante de guest-stars, les créateurs n'ayant pas compris qu'un tel abus (typique des séries US) entrave l'authenticité des personnages secondaires et apparaît parfois comme des "private winks"* puant l'autocongratulation. Dans ce fouillis, seule Marias de Medeiros parvient véritablement à tirer son épingle du jeu, délivrant une interprétation juste et touchante.
L'interprétation globale comme l'écriture crée en outre des personnages clichés d'esthéticiennes écervelées et superficielles, d'un mépris parfois dégradant pour une profession qui subit déjà assez de moqueries injustes. Comme si tout cela ne suffisait pas, notons la mollesse extrême de la réalisation, appuyée par un univers sonore à faire pleurer Michel Chion** : une petite musique cul-cul à chaque fois que la porte de l'institut s'ouvre, un générique somnifère… Au final, malgré un potentiel de départ intéressant, la série est un échec artistique, rien de plus qu'un équivalent Arte de "Plus belle la vie" !
* tentative de néologisme sans doute prétentieux de ma part pour donner un équivalent pas drôle à "private joke" ! (wink = clin d’œil)
** célèbre théoricien du son au cinéma