WOLF
Absence d'avenir
"Wolf" est un film hollandais mêlant les minorités marocaines et turques, dans un noir et blanc aussi sombre que le récit semble dès le départ sans issue pour son personnage principal. Car pour Majid, en période de probation après être sorti de prison avant la fin de sa peine, l'horizon semble bien sombre. Ayant un travail officiel (dans la logistique, donc ennuyeux), le jeune homme se lance corps et âme dans le kick-boxing, espérant faire sa place dans ce sport.
Mais dans le fond, le personnage n'a pas vraiment d'espoir. Il évolue dans un milieu pauvre, respecte son travailleur de père (même si la réciproque est fausse), subvient aux besoins de sa mère et de son jeune frère en faisant de petits coups (vol, explosions de distributeurs...), et seuls des coups plus gros (avec les caïds turcs du secteur) semblent constituer son proche horizon. Et c'est à une perte de repères que nous convie le scénario. Sans évoquer jamais la possibilité d'une rédemption ou d'un retour dans le droit chemin, c'est à un oubli de sa condition qu'il mène son personnage qui veut tout : la plus belle fille (un rien nympho...), les petits coups, le gros argent et la gloire liée au sport.
Portrait d'un garçon qui semble ne croire en rien et agit pourtant en protecteur (de ses deux frères notamment, dont le cadet pourrait suivre sa voie, et l'autre est à l'hôpital, gravement malade), violent dans les élans de rage du jeune homme, le film est pourtant jalonné de moments d'émotion : un baiser sur le front de la mère, un contact inattendu avec un frère agonisant qu'on aide à sortir, une étreinte de la dernière chance avec un père distant. Marwan Kenzari, le visage angevin et le regard perçant, est tout juste parfait dans ce rôle d'homme seul, bienveillant pour d'autres, autant qu'il est insouciant pour lui-même et sa réelle condition.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur