Festival Que du feu 2024 encart

WHIPLASH

Un film de Damien Chazelle

Chef, oui, chef !

New York. Au conservatoire de Shaffer, un élève de première année est repéré par le professeur le plus craint et le plus admiré de l’école. Celui-ci lui propose d’intégrer le prestigieux Studio band, cours réservé aux élèves représentant l’école à différents concours. Saisissant sa chance, Andrew va redoubler d’efforts, répétant sans cesse, pour accéder aux exigences de son professeur, même si cela lui coute sa vie personnelle, sa santé ou sa vie. Bienvenue dans le monde impitoyable de la performance scénique et de l’exigence du jazz…

Le rapport de force, quasi militaire, entre élève et professeur, est l’élément clé du film, surpassant la beauté des morceaux joués ou leur complexité. Le duo de personnages passe de l’admiration au dégoût, du respect à la haine, de l’encouragement à l’humiliation et la dévalorisation. Une lutte de pouvoir cruelle entre un musicien confirmé et son apprenti, terriblement enivrante et terrifiante à la fois, que seuls les musiciens ou sportifs de haut niveau peuvent accepter pour espérer toucher du bout des doigts le sommet.

Pour réaliser un tel film qui rende l’intensité et l’abnégation que représente un tel choix de vie, il ne fallait d’autres qu’un musicien qui a lui-même fait ce sacrifice. En effet, David Chazelle, le jeune réalisateur de ce petit bijou, est allé puiser dans ses quatre années d’expérience de conservatoire en tant que batteur pour écrire, réaliser et monter "Whiplash". C’est certainement pour cela qu’il réussit à capturer la douleur et la détermination de son personnage principal avec une rare intensité, à coup de plans serrés sur le visage ruisselant ou les doigts ensanglantés d’Andrew. On pourrait presque faire le parallèle entre ce jeune prodige et Nathalie Portman dans "Black Swan", chacun cherchant la performance, et glissant lentement vers l’obsession de la perfection, jusqu’à la folie.

Même si l’on peut trouver des défauts à "Whiplash", que ce soit ceux des premiers films ou des films un peu trop autobiographiques, il est indéniablement un film sur la musique d’une grande intensité, au montage punchy, dont on ne sort pas sans émotion. C’est d’ailleurs grâce à cette énergie hautement contagieuse que le film a reçu le Grand prix et le Prix du jury au festival du film américain de Deauville cette année.

Anecdote : Miles Teller, qui interprète le personnage principal, vu en début d’année dans "The Spectacular Now", a fait quinze ans de batterie et réalise 70% des scènes où son personnage joue de cet instrument.

Véronique LopesEnvoyer un message au rédacteur

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