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LES VOIES DU DESTIN

Un film de Jonathan Teplitzky

CONTRE : Niveau -1 - Une histoire bouleversante tuée par une mise en scène cabotinant

Eric Lomax est un passionné de trains. Il les connaît par cœur, peut discourir des heures sur les différents parcours ferroviaires à travers l’Écosse et sur les horaires des convois. Quand il rencontre Patricia Wallace, sa seconde femme, il tente de lui cacher le syndrome post-traumatique dont il souffre depuis son emprisonnement par les Japonais durant la Seconde Guerre mondiale. Il y a contribué à l’édification d’une voie de chemin de fer entre le Siam et la Birmanie, et a surtout subi d’innommables séances de torture…

Ça commence comme un conte de fée. Un homme et une femme se rencontrent dans un train. C’est le coup de foudre ; ils s’aiment, se marient et rien ne semble pouvoir leur arriver. Mais ce bonheur va rapidement être mis à mal par les terribles cauchemars qui hantent le beau prince, et la réalité vient alors estomper ce doux songe. Car l’homme est un ancien soldat, prisonnier de guerre torturé par les forces japonaises pour avoir fabriqué une radio, toujours traumatisé par la violence de sa détention passée. Se basant sur un roman autobiographique, le film, par le regard du lieutenant Lomax, nous raconte la construction du chemin de fer, « la voie ferrée de la mort », reliant la Birmanie et la Thaïlande durant la Seconde guerre mondiale.

Déjà montré au cinéma à plusieurs reprises, dont bien évidemment dans le sublime "Le Pont de la rivière Kwaï" de David Lean, cet épisode historique a toujours intéressé le cinéma. Et il est vrai que le destin tragique de ces hommes, rendus en esclaves pour permettre au Japon d’atteindre son rêve de grande Asie Orientale, bénéficie d’une puissance évocatrice et émotionnelle extrêmement prégnante. Néanmoins, là où David Lean avait su magnifier son propos en s’éloignant des clichés pour capturer la folie meurtrière qui pouvait s’emparer de l’homme, Jonathan Teplitzky ne dispose pas des mêmes qualités de mise-en-scène. Grossissant lourdement le trait, le réalisateur se fourvoie dans une surenchère d’effets dramatiques, cherchant à titiller en vain nos glandes lacrymales.

Beaucoup trop démonstrative, l’architecture du métrage constitue son principal défaut. Alors que le drame intérieur du protagoniste principal n’aurait été que renforcé en laissant mystérieuses certaines parties de l’histoire, le choix de recourir à des flashbacks atténue considérablement la force émotionnelle du film. Surtout, en s’attardant vulgairement à essayer de nous montrer son expérience sur le front, le film omet complètement de s’intéresser à la psychologie du personnage, aux tourments de cet homme dont les trains ont toujours occupé une place particulière.

Les choix esthétiques hasardeux, couplés à des problèmes d’écriture déplorables, finissent par éloigner les spectateurs de l’intrigue, malgré la prestation plus qu’honorable des différents comédiens. En voulant absolument faire pleurer dans les chaumières, le cinéaste australien sombre dans un pathos désolant, d’autant plus que le destin hors-norme de cet homme se suffisait largement pour toucher le cœur du public. Et même si le dénouement est poignant, il est bien difficile de ressentir quelque chose sous cette couche de minauderies trop appuyées.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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