VERMINES
D’une redoutable efficacité
Vivant avec sa sœur dans un appartement d’une cité, le jeune Kaleb collectionne les reptiles et autres animaux dans les vivariums de sa chambre. Achetant une araignée venue du désert, il met celle-ci dans une boîte à chaussures. Mais cette dernière s’échappe et commence à se multiplier…
Avec toute la vague de films de genres ambitieux français ou francophone qui a déferlé ces derniers mois dans les grands festivals ("Acide" et "Le règne animal" à Cannes, "Gueules noires" à Angoulême, "En attendant la nuit" à Venise...), on se désespérait un peu de trouver celui qui nous ferait réellement peur. On tient enfin celui-ci avec "Vermines", présenté en clôture de Semaine de la critique du Festival de Venise. Il faut dire que non seulement son auteur n’a pas hésité niveau références, mais les moyens sont aussi là pour démultiplier les araignées plus ou moins grandes (y compris des vraies) qui vont infester un immeuble de cité et contraindre leurs habitants à rester enfermés dedans, par crainte d’une propagation incontrôlable.
Après une introduction dans le désert, où un groupe d’hommes recherche sous des pierres le « terrier » d’une araignée particulièrement venimeuse (le sort de celui qui trouvera en premier donne une idée du danger en présence), on découvre le héros, Kaleb, jeune homme de bientôt 30 ans, vivant de petits trafics, alors qu’il fait l’acquisition chez son revendeur, d’un bijou mais aussi d’un exemplaire de la fameuse araignée. Une scène qui fait forcément penser à une transposition banlieusarde de "Gremlins" et aux ennuis qui viendront par la suite, de par la capacité de démultiplication de la bête. Commencent ensuite les maladresses et l’invasion de l’immeuble par les bestioles, dont la taille ne fait qu’augmenter, s’immisçant partout, dans les conduits d’évacuation de la douche de la salle de bain que rénove sa sœur et ses amis, dans les couloirs et faux plafonds que tente de traiter la concierge asiatique autoritaire, et même à l’intérieur des cloisons.
Le film relègue ainsi sa principale référence, "Arachnophobie" (1990), en créant une angoisse mêlée de jubilation, certaines scènes ou certains plans jouant délicieusement avec nos nerfs (un pote qui passe la tête dans une cloison après avoir transpercé le mur accidentellement, le fan de baskets qui va enfin enfiler ses chaussures chromées…). Ne lésinant pas sur les mouvements brusques, un montage serré ou la caméra portée, et osant même quelques plans marquants (le travelling arrière en spirale dans un couloir infesté…) Sébastien Vanicek transforme son récit en siège, se terminant en apothéose dans un sous-sol. Alors peu importe si le motif d’éloignant de deux potes n’est pas des plus limpides (il n’était pas réellement utile de toute façon), car en jouant avec les clichés sur les immeubles de banlieues (le prétendu dealer dénoncé par un voisin borderline, le fan de chaussures qui « portera des TN jusqu’à la mort », le petit commerçant arabe qu’on surnomme « Ali express », la récurrente lumière automatique qui ne s’allume pas…), il crée des petites respirations dans un récit particulièrement nerveux. Le film, qui constitue aussi une sorte de passage à l’âge adulte pour son personnage principal, devrait faire les beaux jours des festivals de film fantastiques et d’horreur des mois qui viennent, avant de sortir en salles en toute fin d’année.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur