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VARSOVIE 83, UNE AFFAIRE D'ÉTAT

Un film de Jan P. Matuszynski

Un regard lucide mais clinique sur une Pologne sous le joug d'un état policier

Varsovie, capitale de la Pologne 1983. Deux jeunes hommes sont arrêtés par la police lors d’un contrôle d’identité. Embarqués au poste, les choses dégénèrent alors qu’ils sont traités de junkies et de punks, et menacés d’être envoyés en services psychiatriques. Convoquée le lendemain aux urgences, la mère d’un d’eux, militante proche du syndicat Solidarność, découvre que son fils a été battu à mort. Elle va tout tenter pour qu’est lieu un procès, malgré les menaces et tentatives d’intimidation menées par le pouvoir communiste en place…

Varsovie 83, une affaire d’État film movie

"Varsovie 83, une affaire d’Etat" est un film polonais coproduit par la France, passé par la compétition du Festival de Venise 2021, où son titre international était alors "Leave no traces", soit «  ne laisser aucune trace », à l’intelligent double sens : une sorte d’ordre tacite intimé aux policiers qui battaient les opposants politiques, mais aussi un constat plus large sur la classe politique de l’époque, soucieuse de ne rien reconnaître des faits et de réduire le plus possible la médiatisation d’un événement gênant pour le régime.

Basé sur un fait réel (la mort de Grzegorz Przemyk, 14 mai 1983, fils de Barbara Sadowska, militante anticommuniste), ayant enclenché des manifestations monstres de l’opposition en 1983, alors que le mouvement syndical Solidarność était en pleine essor face au pouvoir sous influence soviétique, et que la loi martial était supposée être abolie, le film s’avère une reconstitution efficace, aux réels moments de tension, mais aux rouages peut-être un peu trop lisses. Librement adapté du livre "Leave No Traces, the case of Grzegorz Przemyk" signé Cezary Łazarewicz, le scénario se concentre néanmoins sur seulement quelques personnages et sur la période 1983-84, afin de mieux mettre en avant l’importance symbolique du procès.

Les premières scènes sont au contraire saisissantes, nous immergeant auprès des deux jeunes hommes arrêtés de manière arbitraire, et nous emmenant en quelques minutes vers le décès de l’un des suites de ses blessures provoquées par les coups portés par la malice nationale, alors que son frère, seul véritable témoin, va lui devoir se cacher, de peur d’être éliminé. S’engage alors un combat, celui d’une mère engagée et éprouvée, pour obtenir le procès des policiers violents et surtout de celui qui les a conseillé de frapper dans l’estomac pour justement « ne pas laisser de traces ».

Forcément politique, mais aussi précis et plutôt clinique, le scénario de "Varsovie 83, une affaire d’Etat" tâche de rentrer dans le moindre détail du combat de cette mère et du seul témoin qui se doit lui avant tout de survivre. Une volonté de précision qui nuit cependant quelque peu au rythme du film, souffrant d’inévitables longueurs, alors que c’est tout un système qui se retrouve dénoncé, entre manipulations, intimidations, surveillance, tactiques judiciaires, jeux de pouvoir et compromissions. En ne donnant vie finalement qu’à l’entourage propre du défunt et aux responsables de l’époque, c’est finalement tout un contexte social, religieux et syndical qui est quelque peu mis un peu à l’écart. Diminuant certes ainsi l’impact d’un long métrage pourtant clairement engagé, le scénario n’en relate pas moins sans enjolivure ni fioriture, un événement fondateur du virement démocratique de tout un pays.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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