VALLEY OF LOVE
Étrange atmosphère pour deux géants du cinéma
C'est avec un long plan séquence que Guillaume Nicloux a choisi d'ouvrir son nouveau film. On y suit Isabelle, la mère, de dos, marchant dans les allées d'un quelconque motel en traînant sa valise, entre lumière assommante et chaleur étouffante. Incapable de comprendre le geste de son fils, l’errance de ce fantôme endeuillé est posée d'emblée. Son désir de croire les paroles de son fils disparu, aussi. Puis arrive l'ancien mari, bon vivant, plus pressé de repartir pour s'occuper de sa santé, que préoccupé par une rencontre à laquelle il ne peut croire.
C'est sur cette double opposition que le scénario de Guillaume Nicloux va alors fonctionner. Celle entre une femme encline à la spiritualité et un homme terre-à-terre. Celle entre un fils dont les parents acteurs puis séparés étaient peu présents, et un fils passé à trépas qui les réunit malgré eux. La magie des lieux, lugubres et lumineux à la fois, peut alors agir, créant avec une mélodie évanescente une atmosphère de mystère parfaitement maîtrisée.
La bonne idée est de ne pas avoir fait des deux personnages des ennemis, mais d'avoir engagé un certain nombre de dialogues entre eux, plutôt apaisés. C'est alors à deux excellents numéros d'acteurs que l'on assiste, les deux monstres du cinéma français se connectant parfaitement. Isabelle Huppert excelle dans les scènes de drame retenu, qu'il s'agisse de la lecture de la lettre qui lui est adressée ou des questionnements sur ce fils qu'elle n'avait pas vu depuis longtemps. Quant à Gérard Depardieu, il est tout simplement sensationnel, donnant de sa personne (il ne cache rien de ses rondeurs...) et oscillant entre apparente insensibilité et douceur subite. Tous deux portent sur leurs épaules un film étrange, touchant par ses dialogues d'une finesse rare et qui questionnera chacun sur son rapport à la mort.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur