UNIVERSAL THEORY
Une surprenante histoire d’amour au delà des dimensions
Au début des années 70, Johannes se fait charrier par un présentateur sur un plateau télé, alors qu’il présente son livre, La Théorie du tout, défendant l’existence de mondes parallèles. En 1962, lors d’un congrès de physique dans les Alpes suisses, il avait déjà commencé à étayer cette théorie, contre l’avis de son tuteur. Là, d’étranges phénomènes se sont pourtant alors produits, l’observation d’une curieuse formation nuageuse dans le ciel, des disparitions d’hommes dans les montagnes, retrouvés le crâne ouvert, et surtout la présence récurrente de Karin, une jeune pianiste de l’hôtel, qui semble, selon les moments, tout savoir de lui…
Film allemand à la superbe photographie noir et blanc, "Universal Theory" est à la fois film d’aventure, un film fantastique, un thriller et une romance hors normes, qui vous marque autant par ses qualités esthétiques que par tout l’imaginaire qu’il charrie. La scène d’ouverture, située dans les années 70, nous introduit le personnage principal, Johannes, écrivain, qui se voit moqué par un animateur télé, alors qu’il vient présenter son livre sur l’existence de mondes parallèles. Il faut dire que ce livre, son éditeur le présente comme un roman, mais celui-ci s’acharne à le décrire comme une part réelle de sa vie. Vexé, le personnage ne restera pas sur le plateau, mais la suite du film nous renverra douze ans plus tôt, en 1962, afin de découvrir ce passé qui l’habite et de mieux comprendre la quête qu’il poursuit en publiant ce livre si personnel. Alors qu’il préparait sa thèse et se rendait en train avec son tuteur à un important colloque dans les Alpes suisses, il croisa à bord un autre chercheur, visiblement porté sur la boisson, chez qui il trouvera plus d’écoute et de crédit pour ses recherches, remises en cause par son maître de thèse. Et c’est ensuite sur les lieux, qu’il va trouver de quoi nourrir sa théorie.
Depuis sa présentation en compétition au Festival de Venise, où il a obtenu le Prix de la critique indépendante, le film n'a cessé d'accumuler les prix (Prix de la critique au Festival du film fantastique de Sitgès, Grand Prix nouveau genre et Prix du Public à l’Étrange Festival). Et même s'il était étrangement absent de la sélection du dernier Festival de Gérardmer, celui-ci débarque enfin dans les salles en cette fin février, et devrait sans nul doute créer un fort bouche à oreille. Suggérant la disparition de deux enfants, découvrant une mystérieuse trappe dans une grange, menant à des échelles, avant même leur arrivée sur les lieux, le récit commence alors à s’imprégner de mystère. Il nous emmènera alors dans les entrailles de cette montagne, où semblent se passer des phénomènes étranges, entre des tunnels, des pistes de ski, des bâtiments isolés et ce fameux hôtel. Qu’il s’agisse du scientifique alcoolique, ou de la pianiste, le film commencera alors à titiller notre imagination, alors qu’ils apparaissent là où ils ne devraient pas, et semblent ne pas être réellement les mêmes personnes.
Redoutablement intelligent, le scénario se double rapidement d’une quête amoureuse, alors que l’homme croise cette femme, d’abord dans une église, puis dans un salon de l’hôtel, comprenant vite qu’elle sait parfois beaucoup de choses sur lui, alors qu’ils sont supposés ne pas se connaître. Avec ses disparitions mystérieuses, ses cadavres au crâne partiellement réduit en miette, ses versions multiples de certains personnages, et cette touchante quête d’une femme multiple et pourtant si unique, "Universal Thoery" est à la fois un film fantastique prenant et une histoire d’amour bouleversante. Nouvelle et étrange approche d’un multiverse (thème ayant donné naissance à de nombreuses curiosités ces dernières année, que ce soit les films d’animation de la saga "Spider-Man : Across The Spider-Verse", ou le multi-oscarisé et bourré d’imagination "Everything Everywhere all at once") est à une œuvre visuellement saisissante, qui ne pourra que troubler le spectateur, avide de le revoir pour y déceler de nouveaux indices. S’inspirant de l’expressionnisme allemand, mais aussi influencé par certains films de science-fiction des années 50, son imagerie aura en tous cas, tout pour convaincre les spectateurs désireux d’évasion et les passionnés de scénarios torturés, qui vous laissent en tête plein d’interrogations. A découvrir d’urgence.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur