Festival Que du feu 2024 encart

TUNNEL

Un film de Kim Seong-hun

Un drame qui ne manque pas d’humour ni de tension

Jung-soo est sur la route, pressé de retrouver sa famille. Après s’être fait remplir laborieusement le réservoir dans une petite station-service, il emprunte un long tunnel pour rejoindre son domicile. Malheureusement, à sa grande surprise et horreur, celui-ci s’écroule soudainement sous sa voiture. Coincé dans sa carlingue et bloqué dans les décombres qui ne cessent de menacer de leur instabilité, Jung-soo, n’a qu’un gâteau, deux bouteilles d’eau et son portable pour tenir jusqu’à ce que les secours le localisent…

Décidément, après un "Hard Day" des plus efficaces, Kim Seong-hun continue sur sa lancée et prouve une fois encore à quel point les grosses productions sud-coréennes peuvent savamment mêler divertissement et critique politique et sociale sous un ton des plus caustiques. Tandis que son précédent film sur le polar burlesque enchaînait des situations parfois des plus improbables, "Tunnel" est beaucoup plus ancré dans le drame claustrophobique sans pour autant oublier de désamorcer les moments les plus sérieux et lacrymaux à l’aide d’un boxer qui servira de ressort comique à de nombreuses reprises ou de SCUDs envers l’incompétence des autorités ou des politiques.

Il est toujours impressionnant que constater à quel point les réalisateurs coréens parviennent à mêler les genres tout en gardant l’équilibre de ton de leurs productions. "Tunnel" n’échappe pas à cette prouesse, on passe tour à tour de l’hilarité, à la peur, au stress, à la tristesse et au sentiment de révolte, au grès des situations qui s’enchaînent dans ce drame très bien ficelé malgré la simplicité de son synopsis. A contrario, de "Hard Day" qui envoyait un retournement de situation toutes les dix de minutes, "Tunnel" est plus posé dans son approche mais n’en est pas moins haletant dans son propre style.

Au-delà de l’aspect survie, le dernier film de Kim Seong-hun pose une critique acerbe de l’incompétence et de la corruption de l’Etat coréen à travers le scandale des tunnels non conformes aux réglementations ou encore à la cupidité des groupes de constructions et aux intérêts financiers qui s’y attachent. Preuve que les Coréens éprouvent la même défiance envers leurs politiques que le peuple européen et que les scandales y sont aussi légion même si les récentes affaires accusant la présidente Park et la ministre de la culture nous l’avaient déjà prouvé. Néanmoins, c’est toujours un délice de retrouver cette manière si corrosive de dénoncer les institutions dans une superproduction de divertissement. Peu de réalisateurs occidentaux parviennent à jouer ce tour d’équilibriste de manière aussi efficace.

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT

Laisser un commentaire