TU NE TUERAS POINT
Un film de guerre aux puissantes scènes de bataille, gâché par une fin caricaturale
On voit bien ce qui a motivé Mel Gibson, homme de foi, dans son désir de conter les actes héroïques de Desmond Doss, premier soldat objecteur de conscience de l'Histoire, ayant reçu la médaille d'honneur du Congrès américain. Une histoire où sauver des vies prend le dessus sur la nécessité de faire la guerre, permettant une impressionnante reconstitution historique. Construit en deux parties clairement distinctes, son film expose dans un premier temps le harcèlement dont fait l'objet ce jeune homme, engagé volontaire refusant de tenir un fusil. Puis dans une seconde partie il plonge son héros au coeur d'une bataille suicidaire, visant à prendre les bases japonaises situées en haut de la falaise de Maeda, au Japon.
À l'articulation des deux, un procès en cour martiale que Gibson a eu la bonne idée de réduire au minimum, tout en en escamotant tout de même un peu les enjeux. La première partie est efficace, posant les bases d'un traumatisme paternel et d'un amour naissant pouvant servir de support dans les pires moments. Puis la seconde décrit l'horreur avec puissance et minutie, l'auteur, qui n'était pas revenu à la réalisation depuis "Apocalypto" en 2007, n'étant jamais aussi efficace que dans les scènes de bataille, donnant ainsi à voir la boucherie qu'a pu être la bataille d’Okinawa.
La représentation des combats est redoutablement efficace, à la fois crue et frontale, haletante et cruelle. Comme dans "Braveheart" et "La passion du Christ", Mel Gibson excelle une fois encore dans la peinture de la violence et des atrocités dont sont capables les être humains. N´hésitant pas à montrer les blessures, la chair calcinée, les balles invisibles, les impacts multiples, les casques transpercés, les morts utilisés comme bouclier ou dévorés par les rats, il donne dans le détail macabre pour mieux faire prendre conscience de l'absurdité de la guerre.
Mettant en avant, pendant tout le récit, le courage et la détermination morale d'un individu, il retrace cependant ici un nouveau calvaire, cette fois à double détente (le harcèlement encouragé de la première partie dans les baraquements, puis l'interminable face à face avec des ennemis innombrables dans le « no man's land » du haut de la falaise). L'intention est noble, la mise en scène percutante, la photographie magnifique (l'utilisation de la poussière est admirable), le montage serré, et l'humour ponctuellement présent (l'allusion au "Magicien d'Oz"). Malheureusement, les dix dernières minutes viennent un peu tout gâcher, empêtrées dans de lourds symboles religieux et une approche maladroite de la question de la foi.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur