Festival Que du feu 2024 encart

TRUE NORTH

Un film de Eiji Han Shimizu

Derrière les apparences…

Après que son père ait disparu et que le reste de sa famille ait été envoyé dans un camp pour prisonniers politiques, tristement célèbre, en Corée du Nord, un jeune garçon va devoir apprendre à survivre dans des conditions difficiles, trouver un sens à sa périlleuse existence, et peut-être même s’échapper…

True north film animation image

Sans que l’on sache réellement si cela découle de l’actualité ou d’un pur hasard, la sélection du festival d’Annecy 2020 fut fortement marquée par la prédominance du témoignage historique et politique au sein des films présentés. Relégué dans la section Contrechamp de cette édition Online, "True North" s’inscrit parfaitement dans cette démarche en décrivant le quotidien d’une famille envoyée dans un camp de prisonniers nord-coréens et l’évasion d’un de ses membres qui, des années plus tard, livre son témoignage sur un plateau de télévision. Il faut attendre la scène finale pour que le parti pris narratif de départ – un constat au présent qui lance d’entrée un long flash-back sur les étapes ayant mené à cette évasion – se retrouve tout à coup renversé par un détail trompeur, sorte de parallaxe permettant alors de redéfinir l’enjeu véritable de l’intrigue. Cet effet de surprise est sans doute le point le plus intéressant de ce film avant tout modeste et sincère, qui réussit même à esquiver LE piège qui lui pendait au bout du nez.

Il y a déjà deux ans, en sortant de la projection de "Funan" (grand vainqueur du Cristal du long-métrage cette année-là), on s’énervait à nouveau de cette propension à insister exclusivement sur le manichéisme du contexte et les exactions d’un groupe armé dans le seul but de créer une indignation forcée. Avec un sujet aussi délicat que l’enfer de la vie carcérale, on a l’impression que la subtilité est condamnée à être systématiquement bannie au profit du tire-larmes le plus primaire. Or, le cinéma peut se prévaloir d’outils et de méthodes permettant d’utiliser ce contexte oppressant pour se concentrer sur autre chose – des tas de films l’ont démontré, de "La Liste de Schindler" au "Fils de Saul" en passant par les films de Rithy Panh. Sur "True North", on a quand même droit à une petite surprise : la surprenante douceur du film est corollaire d’une animation figée et d’un récit avant tout illustratif, qui ne force jamais le trait et qui s’en tient à la lecture objective des événements du camp (humiliation, travaux forcés, cérémonies imposées, plans d’évasion, etc…). Le bon point, c’est que ce choix risqué permet au film de retenir son envie d’indignation au lieu de l’appuyer. Le mauvais point, c’est que cela le prive in fine de toute émotion. On regarde donc "True North" comme on feuilletterait un livre d’images, beau et appliqué, avec quelques belles percées symboliques ici et là. Mais vu la finalité du témoignage apporté, le reproche n’a pas lieu d’être.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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