TRON, L'HÉRITAGE
Graphiquement impressionnant
En 1989, quelques années après avoir récupéré les rennes de Encom, la compagnie qui développait notamment des jeux vidéo qu’il avait créé, Kevyn Flinn disparaissait sans laisser de traces. De nos jours, à 27 ans, son fils Sam, bien peu intéressé par la compagnie en question, tente cependant de faire respecter les principes éthiques de son père, quitte à hacker le système de l’intérieur. Un beau jour, l’ancien associé de son père et ami, Alan Bradley, lui indique qu’il a reçu un coup de téléphone émis depuis l’ancien bureau de son père, dans les salles de jeux « Chez Flynn’s » pourtant désaffectées depuis longtemps…
Anciennement intitulé « Tron 2.0 », voici donc que débarque sur nos écrans « Tron, l'héritage » (« Tron legacy » en version originale »), suite, quelques 28 ou 29 ans après du classique de Disney « Tron ». S'il n'est pas nécessaire d'avoir vu le premier épisode pour regarder le second, il est tout de même intéressant d'avoir quelques bases. Surtout si l'on souhaite tenter une comparaison entre les deux. Cela dit, il faut bien avouer que la fascination qu'a pu exercer le premier opus, sorti en 1982 sur nos écrans, était assez compréhensible à l'époque, du fait des balbutiements de la technologie de dessin en trois dimensions, et des jeux Atari. Son succès relatif, s'explique certainement par la complexité d'un scénario qui mêlait complexes notions informatique aujourd'hui parfaitement assimilées par le grand public, et intrigue du type roman d'espionnage industriel des plus obscures.
En effet, en 1982, dans le premier volet, Kevyn Flinn et Alan Bradley s'alliaient pour trouver dans les ordinateurs de la compagnie Encom, la preuve de malversations concernant les droits de propriétés de certains jeux créés par Flinn. Ce dernier, déjà interprété par Jeff Bridges, tentait de créer au début, un programme dénommé Clu qui pouvait infiltrer le réseau, et déjouer les protections de Ed (le Maître Contrôle Principal ou Master Control Program en v.o.). Aspiré dans le programme de jeux vidéo, à l'aide d'un désintégrateur de particules, Kevy Flinn, pris pour un programme (et non un « utilisateur » qu'il est) fera alors équipe avec Tron, le programme de son ami Bradley (sous les traits de son créateur Bruce Boxleitner, plus connu pour ses rôles dans ses séries télé, comme « Les deux font la paire », et jouant toujours Bradley aujourd'hui), pour arriver à trouver la preuve et revenir dans le vrai monde.
Dans le premier épisode nous avions donc un duo de méchants: le directeur de la compagnie Ed Dillinger, et son programme de surveillance, Ed, qui avait tendance à prendre de l'indépendance et devenir incontrôlable par les humains, symbolisant, comme dans « War games » un certain danger inhérent à la technologie. Dans le second, nous n'avons plus qu'un seul véritable méchant, Clu lui-même, alors piégé en 82 par le Maître Contrôle Principal, et devenu une sorte de tyran à son tour. Attirant le fils de Flynn dans le jeu, pour mieux s'emparer de la mémoire de Flynn lui-même, il représente aujourd'hui un autre type de risque, dont la lisibilité politique semble moins évidente, lié au perfectionnisme ou à l'hégémonie d'un seul programme. Et la firme aux grandes oreilles ne se prive pas de jouer sur les deux tableaux: caresse dans le sens du poil pour les partisans des logiciels libres de droits avec les agissements du personnage de Sam, et critique de cette idéologie au travers des agissements même de Clu.
Le scénario est aujourd'hui bien plus lisible, et l'action reprend allègrement les scènes classiques du premier film, avec la poursuite en Motos (avec aujourd'hui, une surenchère avec la bien plus impressionnante nouvelle poursuite, en des sortes d'avions-hélicoptères) ou les jeux de frisbee sur des sols transparents prêts à s'effacer au moindre contact avec l'objet. Les figures sont donc déjà vues, mais la technique a fait de considérable progrès, que ce soit pour représenter les décors, ou suivre les mouvements. Clu peut ainsi avoir les traits d'un Jeff Bridges cybernétique, retouché digitalement pour paraître plus jeune et légèrement artificiel. Tron, lui, peut aussi réapparaître, mais masqué cette fois-ci (histoire de ne pas payer Bruce Boxleitner pour 2 rôles ?).
Quand aux décors et vaisseaux du film de 1982, qui ressemblent aujourd'hui à du vieil autocad, en 3D, mais qui n'ont pas à rougir du fait d'une recherche esthétique impressionnante, avec ses couleurs néon flashy pour tout angle ou costume, ils ont aujourd'hui pris une ampleur autre, certainement plus conforme à la vision des auteurs de l'époque, alors irréalisable. Les progrès techniques permettent ainsi de descendre dans des échelles et de capter des niveaux de détails alors impossibles à atteindre. Au final, on peut le dire, et cela est suffisant pour justifier le déplacement, le film est tout simplement époustouflant du point de vue esthétique, le tout sur fond d'une musique signée Daft Punk plutôt envoûtante mais surfant sur la vague des compositions viscérales de Hans Zimmer pour « Batman begins » ou « The dark knight ».
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur