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LES TROIS MOUSQUETAIRES

Un film de Paul W.S. Anderson

Une 3D efficace pour une adaptation matinée de Jules Verne et de Matrix

Après l'échec d'une mission à Venise, les mousquetaires du Roi Louis XIII se retrouvent en disgrâce. Le Cardinal Richelieu en profite pour étendre un peu plus son influence sur la famille royale et les capacités d'intervention de sa garde. Aidé de Milady de Winter, il va tendre un piège au Roi, espérant le forcer à déclarer la guerre à l'Angleterre. Mais c'est sans compter sur l'arrivée d'un jeune Gascon, monté à Paris pour devenir mousquetaire : un certain D'Artagnan...

Décidément « Les trois mousquetaires » est un roman qui n'en finit pas de titiller l'imagination des cinéastes. Ceci depuis les origines du cinéma, puisque la première adaptation date de 1912, sous forme de film muet signé André Calmettes et Henri Pouctal, les américains ne s'étant emparé du récit qu'en 1921, avec Douglas Fairbanks en D'Artagnan. Suivirent, parmi les plus célèbres, la version de 1948 avec Gene Kelly (D'Artagnan), Lana Turner (Milady de Winter) et Vincent Price (le cardinal de Richelieu), celle de 1953 avec Bourvil en Planchet, celle de 1961 avec Gérard Barray (D'Artagnan), Mylène Demongeot (Milady de Winter) et Georges Descrières (Athos), ou encore celle de 1973-74, en deux parties « The Three Musketeers » et « On l'appelait Milady » (The Revenge of Milady), de Richard Lester avec la distribution la plus impressionnante : Michael York (D'Artagnan), Oliver Reed (Athos), Richard Chamberlain (Aramis), Faye Dunaway (Milady), Raquel Welch (Constance Bonacieux), Geraldine Chaplin (Anne d'Autriche), Jean-Pierre Cassel (Louis XIII), Christopher Lee (Rochefort) et Charlton Heston (Richelieu).

Les versions suivantes commençaient déjà à s'éloigner du roman, qu'il s'agisse de "Les Quatre Charlots mousquetaires" en 1974, "La Fille de d'Artagnan" de Bertrand Tavernier (1994), ou "D'Artagnan" de Peter Hyams en 2001. Aujourd'hui, Alexandre Dumas se retournerait-il dans sa tombe en regardant Paul W.S. Anderson, scénariste des trois premiers puis réalisateur du quatrième volet de « Resident evil » porter à l'écran une adaptation à sa sauce ? Nous voici donc en cette rentrée face à une nouvelle resucée des « Trois mousquetaires », qui sont bel et bien toujours quatre, Athos, Porthos et Aramis étant rejoints par le jeune et fougueux D'Artagnan. Certes, le gros de la trame est conservé, du triple duel initial entre D'Artagnan et les trois serviteurs déchus, à la quête du collier dérobé à la Reine, qui doit être ramené avant le fameux bal, mais les scénaristes nous proposent ici une version incluant machines volantes à la Jules Verne et chorégraphies aériennes façon "Matrix".

Toute la richesse de l'intrigue est expédiée en 1h40, diluée en interludes d'une action qui prend d'emblée le dessus. La présentation des défenseurs du Roi et de leurs principaux ennemis se fait par arrêts sur image, au beau milieu d'une charge ou d'un échange au fleuret, façon portrait sur parchemin, rappelant plus de récentes adaptations de Comic's ou un style tarantinesque à la mode que de classiques récits d'aventure. Le principal est donc d'offrir au spectateur son lot d'affrontements à l'épée, certes spectaculaires, mais flirtant ici avec l'impossible. Il y a d'ailleurs de ce point de vue, plusieurs passages qui nous feraient croire à la vision d'un nouvel épisode du-dit feuilleton (« Mission impossible »), voire d'un James Bond. Ainsi, quand Milady sort ses rouleaux de corde pour sauter du haut d'un balcon, ou quand Aramis sort de l'eau avec son scaphandre de ninja, on s'étonne presque que Tom Cruise ne soit pas là pour les guider grâce à une oreillette.

Bref, « Les trois mousquetaires » version 2011 mélange sans scrupule tous les genres, s'offrant au passage quelques morceaux de bravoure plutôt mode (ah les ralentis et accélérés qui se succèdent au cours du même assaut...), ou quelques traits d'humour comme les dialogues ou dragues simultanés aux combats. L'indigestion est proche, d'autant que les personnages sont loin d'être ambiguës (que lève le doigt celui qui ne sait pas qui sont les méchants !). D'autant que comme dans toute comédie américaine récente, on a droit à un passage pipi-caca, un pigeon entrant en jeu alors que Planchet dort sur le balcon, comme s'il s'agissait là d'un gage de rire certain. En fin de compte, « Les trois mousquetaires » version 2011 est un film d'action, à la 3D efficace (puisque tourné avec la fameuse caméra), mais qui aurait pu aussi gagner à vraiment oser le mélange Dumas – Jules Verne, à peine esquissé ici au travers de ballons dirigeables en forme de navires. Les fans d'action s'y retrouveront, les amateurs d'aventures resteront sur leur faim.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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COMMENTAIRES

Jean-Michel Bessou

vendredi 8 novembre - 10h12

Je suis un lecteur passionné d'Alexandre Dumas, et certes j'ai été surpris par le style si particulier de ce film...
Mais après tout, pourquoi pas ?; j'admets que c'est un divertissement un peu superficiel, mais en même temps il a exalte l'amour, l'héroïsme et la beauté !
Il a un certain caractère de folie qui s'accorde bien avec l'époque baroque : ce qu'elle représentait dans les arts, il le montre dans la technique.
On rêve, on est séduit, mais ce rêve on n'y croit pas une seconde : on peut en profiter pour philosopher sur la réalité et sur les illusions du monde... ... Et admirer brièvement l'extraordinaire maîtrise artistique qui a permis de créer, avant de passer à autre chose.

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