TROIS MILLE ANS À T'ATTENDRE
Cinquante nuances de défauts
Alors en voyage en Turquie, Alithea fait l’acquisition d’une bouteille. À l’intérieur, se cachait un génie qui lui propose d’exaucer trois de ses vœux, comme le veut la tradition. Mais que souhaiter lorsqu’on se complaît dans son existence et sa solitude ?…
Alors que tout le monde attend son film sur Furiosa après la claque reçue avec "Mad Max : Fury Road", voilà que George Miller a décidé de s’offrir une parenthèse avec un projet marketé comme un conte pour enfants. Sur le papier, rien de bien étonnant, le réalisateur australien s’étant déjà adonné à l’exercice avec le culte "Babe 2, le cochon dans la ville" et les deux volets de la saga animée "Happy Feet". Comme souvent chez le cinéaste, le synopsis est trompeur, la forme prenant des directions inattendues, épiques et grandiloquentes. Véritable déclaration d’amour au Septième Art, à la puissance de l’imagination et au savoir-faire si complexe de raconter des histoires, "Trois mille ans à t’attendre" est une œuvre surprenante, ambitieuse, néanmoins plombée par une esthétique nanardesque qui annihile toute émotion.
Le récit débute à Istanbul où une professeure en narratologie fait l’acquisition d’un flacon dans une boutique d’antiquité. À l’intérieur de celui-ci, un génie (un djinn plus précisément) n’attendait que de pouvoir sortir pour concrétiser les trois vœux de son sauveur. Lorsqu’on maîtrise cette vieille coutume, cet apparent don peut vite se transformer en cadeau empoisonné tant on sait que chaque souhait exaucé entraîne souvent des conséquences néfastes. Les deux protagonistes vont alors se lancer dans une conversation profonde et métaphysique, interrogeant aussi bien l’avenir de la science et l’évolution de la fiction, que des sujets plus intimes comme l’amour et la solitude, tout en revisitant les 3 000 ans de souvenirs de l’être magique.
Si le métrage réussit à s’extirper de son cadre limité (deux individus discutant dans une chambre) pour proposer une vraie expérience, il est simplement regrettable que tout soit fait avec autant de mauvais goût, aboutissant à un résultat kitsch et abject. Malgré le talent des deux comédiens (Tilda Swinton et Idris Elba), rien n’est à sauver de ce film embarrassant, aux dialogues plus souvent ridicules que philosophiques, et dont la dernière partie tourne au grotesque. Certes, George Miller prouve une nouvelle fois qu’il est un magnifique artisan, parvenant presque à transformer les contraintes liées au COVID-19 en un atout narratif, mais les situations caricaturales et le rendu carnavalesque condamnent cet exercice de style à un beau raté !
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur