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THE SWEET EAST

Le doux air de la folie américaine

Lors d’un voyage scolaire, Lillian fugue. Au fur et à mesure de ses rencontres durant sa fuite, elle va rencontrer différents individus qui vont la prendre sous son aile. Et avec eux, c’est un portrait de l’Amérique qui se dessine…

The Sweet East film movie

S’il s’agit de son premier long métrage, Sean Price Williams n’est pas un néophyte lorsqu’il s’agit de tenir une caméra, lui qui a notamment été chef opérateur sur des films d’Alex Ross Perry (qui officie ici en tant que producteur) et "Good Time" des frères Safdie. Sans surprise, son projet s’inscrit dans la lignée de ses pairs, dans cette mouvance du normcore, ce cinéma américain fauché où l’on parle beaucoup pour faire oublier le manque de budget. "The Sweet East" suit Lilian, une jeune fille à la beauté troublante. Durant un voyage scolaire, elle décide de prendre la poudre d’escampette suite à l’intrusion d’un homme armé dans une pizzeria, persuadé que des enfants sont violés au sous-sol. Au fil de son périple, se dessine un portrait sombre de l’Amérique contemporaine, où l’on croise tout l’échiquier du radicalisme, des suprémacistes aux islamistes, en passant par les adeptes des théories du complot. Au passage, les artistes libéraux de gauche, étendards du wokisme, en prendront également pour leur grande.

Dans son trip sardonique, le réalisateur semble totalement s’amuser, jouant avec les genres et les références, invitant même la star d’"Euphoria", Jacob Elordi, pour lui offrir une drôle de trajectoire. Le problème, c’est que les mécanismes de la satire ne sont pas suffisamment bien huilés, trop visibles, trop artificiels, transformant cette Alice au pays des rednecks en une farce rarement subtile, et surtout plombée par sa propre théorie. Demeurant à l’état de manifeste plus qu’à celui d’une œuvre aboutie, le film laisse entrevoir les prémices d’un talent, malheureusement ici trop éparpillé pour véritablement toucher sa cible. De cette folie sociale et politique, il n’en reste que quelques répliques bien aiguisées à défaut d’avoir un ensemble totalement corrosif. Sélectionné à Quinzaine des Cinéastes de l’édition 2023 du Festival de Cannes, "The Sweet East" laisse un goût d’inachevé, mais à l’image de son charme suranné et de quelques passages de pure comédie, il est porteur, presque ironiquement d’un espoir : celui d’un metteur en scène à suivre.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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