THE ROOM
Au-delà de la corne d’abondance, une efficace relecture de la relation créature créateur
Kate et Matt s’installent à la campagne dans une grande maison isolée, qu’ils s’apprêtent à retaper. Intrigués par les plans, rapidement, sous plusieurs couches de papier peint, ils découvrent l’existence d’une pièce centrale, condamnée, accessible par une énorme porte métallique pleine de symboles, grâce à une étrange clé. Matt, artiste peintre, exerçant donc à la maison, découvre que cette pièce a le pouvoir d’exaucer ses vœux : une bouteille, des tableaux de maîtres, de l’argent à profusion…
Disponible en VOD à partir du 15 mai 2020
Christian Volckman, réalisateur il y a presque 14 ans du remarquable film d’animation "Renaissances", également peintre, revient avec un film en live action, mêlant critique (certes légère) de l'opulence et de la société de consommation, et dilemme intime pour un couple ukraino-belge incapable d’avoir un enfant. Posant rapidement le postulat de l’existence d’une mystérieuse pièce dans la maison que le couple vient de racheter pour la rénover, capable de faire apparaître tout objet désiré (une sorte de corne d’abondance privative), il complexifie l’histoire en matérialisant l’ultime désir de la mère, et en adossant quelques règles qui compliquent fortement les choses.
Les twists sont ainsi nombreux à jalonner cette histoire, certains étant peut-être plus faciles à anticiper que d’autres, mais ils permettent de déboucher sur un final complexe, au montage alterné plutôt malin. Grâce à une belle direction artistique, la maison étant progressivement « désossée » par le personnage masculin, ses élans artistiques envahissant également l’espace comme si la maison devenait une part de sa psyché, le film vire à l’affrontement entre deux visions de cette illusion de pouvoir aller au-delà de la possession en devenant tout bonnement créateur.
Les deux interprètes disposent d’une alchimie évidente. Olga Kurylenko ("A la merveille", "Quantum of Solace", "La mort de Staline") incarne parfaitement la prise de dessus d’une paranoïa envahissante et le refus du renoncement. Tandis que Kevin Janssens ("Tueurs", "Revenge") parvient à faire vivre le doute et les questions les plus morales face à ce qu’ils désiraient pourtant tout deux. Au final, le film, découvert au dernier Festival de Gérardmer 2020, nous tient en haleine jusque au bout.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur