THE COFFEE TABLE
Pas satisfait et non remboursé
Maria et Jesus forment un vieux couple dont les tensions conjugales ne cessent de s’accroître depuis la naissance de leur bébé. Le jour où l’époux ramène chez lui une table basse hors de prix qui n’est pas du goût de son épouse, la tension atteint son point culminant, pour presque rien. Juste une petite vis manquante qui transforme tout à coup ce meuble a priori anodin en un effroyable objet de mort…
On peut franchement dire – et ce sans la moindre exagération – que la nouvelle comédie noire de l’ibérique Caye Cayas ("Matar a Dios") a de quoi mettre les nerfs de son public à très rude épreuve. Avec nos mots à nous, ce n’est hélas pas un compliment qu’on lui fait, surtout au vu d’une prometteuse entrée en matière qui voit une table basse plus laide tu meurs servir d’abord d’objet de discorde au sein d’un couple (il veut l’acheter, elle n’en veut pas dans son salon) puis d’objet de mort suite à un accident de montage (la vitre soi-disant incassable de la table se brise en mille morceaux et décapite sans crier gare le bébé du couple, sous les yeux horrifiés de l’époux et en l’absence momentanée de l’épouse !). Dès lors, ce que l’on suppose être la mécanique apparente du récit – un énorme jeu de massacre sardonique découlant de cette horreur inaugurale – s’efface au profit d’un banal canevas de secret à dissimuler et de suspense à étirer selon la fameuse technique de l’élastique. Sauf que dans "The Coffee Table", c’est la technique de l’élastique… du slip d’un sumo de six cents kilos !
Tout tourne moins autour de la table basse elle-même que (de ce qu’il reste) d’un bébé dont il s’agit de repousser ad nauseam la découverte par la mère et quelques visiteurs (un couple de proches et une petite voisine perverse). Et là-dessus, Caye Cayas emploie la méthode lourde : élargir plus que de raison l’échange avec le vendeur de la table (ici un gros lourdingue pathétique à la recherche d’un ami), faire visiter la chambre du bébé en lâchant un commentaire bien creux sur chaque jouet et chaque élément de décor, envenimer une discussion à table par telle ou telle révélation extérieure, etc… En gros, ici, ça bavarde presque autant que dans "Eaux sauvages" (et on ne dit pas ça parce qu’on cause du karma au détour d’une réplique…). Et quand la chute finale tombe d’un coup sec, ce n’est pas pour inverser le cours du récit à des fins de cruauté perverse, mais plutôt pour mettre un point final à la pauvre logique situationnelle qu’on nous a amené à suivre jusqu’ici. Ou comment étirer sur une heure et demie ce qui aurait pu donner un très solide court sur une durée divisée par trois. Là, pour le coup, on n’est pas acheteur.
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur