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THANKSGIVING : LA SEMAINE DE L'HORREUR

Un film de Eli Roth

Thanksgiving ou le coup de tromblon qu'on n’attendait plus !

Un terrible événement arrive dans la paisible bourgade de Plymouth dans le Massachussets. Comme chaque année, l’ensemble de la ville se mobilise pour célébrer Thanksgiving, mais cette fois-ci le grand magasin local a décidé d’ouvrir pour le Black Friday en avance le soir de la dite fête. Contre toute attente, l’opération commerciale vire au chaos et un an plus tard le souvenir de cette tragédie reste ancrée dans les mémoires de chacun. Et il y a bien un habitant qui a l’intention de faire payer les responsables de ce terrible incident…

Thanksgiving : la semaine de l'horreur film movie

Petite année pour l'horreur en 2023. Hormis des bonnes surprises de la qualité de "Talk to me" ("La Main" en version française), pour l'amateur de péloche imbibée d'hémoglobine et d'un soupçon de folie, les métrages qui valent le détour se font rares. Le festival du film fantastique de Gérardmer nous paraît encore loin et pour nous faire attendre, Eli Roth revient en forme avec son slasher "Thanksgiving". Le metteur en scène est connu pour avoir été l'un des petits malins du début des années 2000 avec des films devenus cultes par la suite comme "Cabin Fever" (2002) ou encore son diptyque "Hostel" et "Hostel 2" (2005 et 2007). Mais il est aussi connu pour ne pas être très régulier quant à la qualité de sa filmographie complète. Il s'est essayé à des productions plus familiales comme avec "La prophétie de l'horloge" en 2018 ou des petites séries B inoffensives ("Knock Knock" 2015) voire franchement passables (le remake de "Death Wish" en 2018 avec Bruce Willis, qui s'en souvient ?). Autant dire que le garçon a refroidi un peu tout le monde à force, et son nom est devenu de moins en moins une référence pour les aficionados de tripes et autres joyeusetés cradingues.

Mais le film qui nous intéresse ici relève plus de la première partie de carrière du bonhomme, plutôt que de ses errances au sein du système hollywoodien. L'idée du film part d'une fausse bande annonce réalisée dans le cadre du diptyque estampillé "Grindhouse" de Robert Rodriguez et Quentin Tarantino. Ce terme qualifie les films des années 70-80 faits avec trois francs six sous et où le sang et la nudité coulent à flot. C'est en hommage à ces films, qui ont fait le bonheur des fans du genre dans les vidéos clubs, que Eli Roth prend la relève avec ce nouveau métrage très ancré dans un style de production typique de ces années-là. Et force est de constater que ce retour à une horreur frontale n'est pas là pour nous déplaire et que le film a l'intelligence de se parer d'un discours critique sur notre société de consommation.

Et tout commence très bien (ou très mal, question de point de vue) avec cette séquence d’ouverture qui nous présente les habitants de la gentille ville de Plymouth attendant devant le centre commercial du nom de RightMart, l’ouverture des portes. En plus du Black Friday, l’offre que tout le monde semble vouloir consiste en un gaufrier gratuit. On remarque évidemment le côté satyre dès cette introduction : le nom du magasin fait référence à WallMart et le logo de l’enseigne à celui d’Amazon. Certes, la subtilité n’a jamais été le fort du cinéaste, mais au moins le message a le mérite d’être clair et d’être forcément reconnaissable dans sa charge politique. Tout le monde l’a vu, tout le monde le sait et le film ne fait que le mettre en image en poussant les curseurs au max.

Et ce qui a partagé l’auteur de ces lignes entre la terreur pure et l’hilarité c’est bien que la vision du cinéaste n’est pas si éloignée de notre réalité. Une clientèle rassemblée par centaines, remontée à bloc pour être les premiers à avoir l’appareil électroménager dernier cri, ceci au point de créer une émeute qui dépasse vite une sécurité très faible de la part de l’enseigne. Et alors tout n’est que chaos, la situation devient cauchemardesque au vu des morts accidentelles à cause du bordel ambiant. Pardonnez ce langage, mais rien que pour cette séquence ce film se doit d’être vu. La caricature n’est jamais trop loin, mais au fond de soi-même on sait qu’on a déjà vu ce type d’images sur BFM un dimanche matin. On repassera pour la finesse, mais déjà dans "The Green inferno" en 2014, quand le même Eli Roth se permet de juger les occidentaux et leurs grands airs face à des peuples dont ils ne comprennent pas les coutumes, il n’y allait pas avec des gants. Le trait est grossier mais la critique est violente, grasse et laisse forcément des traces.

C’est aussi là que Roth peut diviser le public. À grands renforts de musique orchestrale qui en fait des caisses et de mise en scène choc, d’aucun pourrait ne voir là qu’une simple farce. Le film dans son déroulé continue d'étayer cette critique mais l’édulcore au fur et à mesure dans une intrigue finalement assez simplette. On pourra regretter que le film finisse finalement assez sagement avec un dernier acte anti spectaculaire et dont le twist de « qui est enfin qui » n’est qu’un soufflé raté à la cuisson. Pourtant, le film fait bien monter la sauce et les meurtres sont assez inventifs avec des effets gores choquants. Ils soutiennent par ailleurs l’aspect gentiment anti-consumériste quand il nous montre une des victimes du tueur masqué galérer à déverrouiller son téléphone entre la caméra faciale qui ne reconnaît plus ce visage meurtri et le tactile insensible à cause des hectolitres de sang sur l’écran. Le film galvanise quand il tire sur tout le monde et surtout sur notre siècle.

Malheureusement on sent la volonté du metteur en scène de rester dans les clous des codes du slasher : on a bien notre final girl et le plan final qui tue, mais l’identité du tueur et ses motivations sont bien trop sages pour comprendre le sadisme vu tout au long de l’intrigue. Tout, finalement, rentre dans les lignes et annonce une suite. Une bonne nouvelle que le type qui nous a offert un film du calibre de "Hostel Chapitre 2" soit de nouveau sur le devant de la scène avec un projet un peu bête et méchant, mais dont l’énergie est communicative. Attention, crient les écrans de télévision, Eli Roth est de retour et les tripes sont offertes.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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