SIX PIEDS SUR TERRE
Le croque-mort qui apprenait à croquer la vie
Alors qu’il est menacé d’expulsion, Sofiane accepte de travailler pour des pompes funèbres musulmanes. Mais plus qu’un métier, c’est sa propre identité qu’il va découvrir, se rapprochant inexorablement de l’âge adulte…
Pour les plus anglophones parmi nous, le titre français de ce premier film nous rappelle forcément aux bons souvenirs de la série "Six Feet Under". Ce rapprochement n’est pas lié au hasard, les deux œuvres ayant en commun les pompes funèbres comme lieu clé de l’intrigue. Mais ici, pas de comédie, l’aspect dramatique emportant tout sur son passage. Sofiane est un éternel ado ayant beaucoup voyagé, aujourd’hui posé à Lyon pour ses études. Mais un jour, une lettre vient bousculer le quotidien de ce gamin désinvolte et paumé : il est menacé d’expulsion, lui, le fils d’un ancien diplomate algérien. Espérant pouvoir régulariser sa situation, il accepte un job incongru : travailler dans des pompes funèbres.
Si le scénario est légèrement cousu de fil blanc (côtoyer les morts pour retrouver sa raison de vivre), le métrage séduit dès qu’il nous plonge dans la beauté des rituels, nous invitant au cœur des cérémonies avec pudeur et subtilité. De ce portrait d’un anti-héros nonchalant, "Six Pieds sur Terre" livre un récit d’initiation touchant et jamais agaçant – ce qui n’est pas loin d’être un petit miracle au vu de la caractérisation de son protagoniste. Des maladresses et des redondances empêchent le film de véritablement trouver son rythme, mais le résultat n’en demeure pas moins joliment poétique, tout en questionnant notre rapport à la religion sans sombrer dans les clichés.
Loin de la basique confrontation entre la modernité incarnée par les soirées festives et le poids des traditions, la première réalisation de Karim Bensalah permet aussi de mettre dans la lumière un acteur saisissant : Hamza Meziani. Et juste pour ça, le détour par les salles obscures n’est pas de trop.
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur