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SIMON DE LA MONTAÑA

Un film de Federico Luis

Une œuvre surprenante et déstabilisante sur le passage à l’âge adulte

Simon, un jeune homme d’une vingtaine d’années, commence à se faire de nouveaux amis. Mais il semble ne plus être totalement lui-même au sein de ce groupe…

Après plusieurs courts métrages remarqués en Festival, dont "La Siesta", déjà passé par Cannes en 2019, le cinéaste Federico Luis signe son premier long. Et le moindre que l’on puisse dire, c’est que celui-ci ose un pari audacieux pour son passage sur une durée supérieure. Le métrage s’ouvre au milieu des montagnes de la Cordillère des Andes, avec un groupe d’adolescents et jeunes adultes handicapés laissés à leur propre compte. Mais quelque chose semble clocher dans cette situation, début d’un jeu de pistes et d’apparences qui ne cessera jusqu’au dernier instant. Car le film décide de ne pas apporter de réponses, préférant questionner la notion de normalité et amener ses protagonistes dans des zones troubles.

À l’exception de cette séquence initiale, la caméra de Federico Luis ne va plus s’attarder sur les sublimes paysages, préférant capturer les personnages au plus près, les mouvements des visages dictant ceux de l’objectif. Dans cette bande, Simon sera notre point d’entrée et notre repère. Il a 22 ans, aime dire qu’il sait cuisiner mais que ce n’est pas toujours fameux. Il est fier de dire qu’il a un métier, aide-déménageur. Mais il ne semble pas tout à fait lui-même dans cet environnement. À moins qu’il devienne même carrément quelqu’un d’autre. Drame à la limite du thriller, "Simón de la montaña" est une œuvre déroutante par son refus d’expliquer les intentions de son héros, au point de plonger certaines scènes dans une ambiance profondément malaisante.

Si le film réussit autant à secouer, c’est en grande partie dû à la performance de Lorenzo Ferro. Déjà remarqué sur la Croisette pour l’excellent "L’Ange", le comédien aime décidément les rôles complexes, où les intentions sont difficilement résumables en une phrase, et nous offre ici une prestation impressionnante de justesse malgré l’exercice ô combien périlleux. En dépit de quelques redondances scénaristiques et une certaine tendance au voyeurisme, cette plongée dans la psyché nébuleuse d’un adulescent en quête de relations amicales et amoureuses est une belle démonstration que les handicapés ne sont pas voués à jouer les rôles de simples gentils. En leur proposant des rôles riches, dont la moralité des agissements peut être interrogée au même titre que celles des « valides », Federico Luis les met à l’honneur tout en signant une chronique étonnante. La Semaine de la Critique a eu une nouvelle fois le nez creux.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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