SICK, SICK, SICK
La figure romantique du zombi
Une jeune lycéenne tombe amoureuse du nouvel élève arrivé dans son école. La passion naît entre eux et est consommée. Mais lui est hémophile. Il fait beaucoup de skateboard et un jour il a un accident. Sa disparition soudaine plonge la jeune fille dans une profonde déprime. Ses parents, pour lui changer les idées, l’emmènent en voyage. Elle découvre alors une autre culture dont les rites pourraient ramener son bien aimé à la vie…
Il est intéressant de voir comment l'Amérique du Sud voit la colonisation française et européenne et son invasion dans la mythologie de leur propre pays. Le film se construit comme une lente rêverie, filmée en gros plans, d'une jeune fille qui peine à comprendre l'amour quand il est devant lui, et qui peine à s'en remettre quand il est perdu.
Les figures masculines qui jalonnent son parcours sont très différentes, stéréotypées, car la caméra ne se différencie jamais de son point de vue. Il y a d’un côté son père, quasiment absent, et de l’autre, trois jeunes garçons, qui rythment son périple. Arthur est l'amant, le jeune homme noir qui disparaît soudainement. Il est ténébreux comme seul on peut l’être à 17 ans. Avec une aura et un regard, des silences qui durent et qui ne sont interrompu que par des propos d’une philosophie qui dépasse la jeune fille, qui voit dans l’hermétisme de son amant la marque d’une sagesse supérieure.
Puis il y a l'ami, celui qu'elle rencontre sur la plage. Ce grand haïtien à la figure et à la corpulence enveloppante. Un être jamais menaçant, qui accompagne et tente innocemment de la faire sortir de sa torpeur. Enfin, il y a Matthieu, à la fois l’artiste et l’étranger, le passeur. Il est différent, car il ne parle pas directement la langue, son accent est marquant, exotique. Elle retrouve en lui une partie de l'hermétisme qui faisait le sel du disparu, mais en plus accessible, et aussi plus interdit car paré de menace.
"Sem seu Sangue" est un film presque intelligent sur la passion amoureuse dévorante. Une sorte de métaphore un peu trop littérale que le manque d'incarnation allié à des personnages assez fades, sans grande motivation exprimées et sans réel conflit, rend assez plat. Le choix de la palette pastel, qui s'accorde assez bien avec l'humeur adolescente et une ville brésilienne cramée par le soleil, perd de son sens dans la forêt. Il en va de même pour les gros plans et le langage visuel développé qui fonctionnent très bien pour la première partie urbaine du film, la litanie et la mélancolie, mais qui rend le rythme de la progression et de la quête assez pesant une fois rendu sur l’île.
Ainsi, "Sem Seu Sangue" est un film qui réinvestit le thème éculé du premier amour, avec une certaine fraîcheur. Un film qui s’autorise à montrer la part charnelle d'une relation entre des êtres encore très jeunes et de donner un vrai arc narratif et une quête à une jeune fille perdue. Toutefois, le film reste très évasif et assez peu profond, un peu long parfois. Alice Furtado est en tous cas une réalisatrice prometteuse.
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteur