SEULES LES BÊTES
Un film jeu de pistes, à la construction jouissive
La voiture d’une femme est retrouvée suite à une tempête de neige, sur une route menant au plateau du Causse. Celle-ci reste introuvable. Alors que l’enquête commence, cette disparition va avoir des conséquences sur cinq personnes ayant peut-être un lien avec elle : Joseph, agriculteur solitaire, Michel, éleveur, et sa femme Alice, mais aussi potentiellement celle qu’on appelle Amandine, et Armand…
« Le hasard est plus fort que toi ». Voici une phrase prononcée par l’un des personnages du nouveau film de Dominik Moll ("Harry un ami qui vous veut du bien", "Des nouvelles de la planète Mars") qui donne tout son sens à la construction de cette adaptation du roman de Colin Niel. Chapitré selon les prénoms de 5 personnages, le scénario puzzle co-signé avec son complice de toujours Gilles Marchand (également réalisateur de "L’autre monde") permet de dresser en creux le portrait d’une femme disparue, dont on découvre le sort à mi parcours.
Complexe autant que torturée, l’histoire fait appel à la notion de hasard, et donnera sur le tard leur sens aux premières images du film, situées bien loin des étendues enneigées du Causse, en Afrique. A chacun des chapitres le lot de surprises est tel qu’un plaisir grandissant s’empare du spectateur attentif, comme il semble imprégner chacun des interprètes, campant tous des êtres à leur manière en manque d’amour. Même dans ces étendues où l’isolement, souhaité ou subi, est roi, le désir reste le moteur de la vie, provoquant élans, adhésion, rejets, voire malentendus.
Damien Bonnard rajoute par son rôle, à l’étrange ambiance de l’ensemble. Denis Menochet inquiète autant qu’il finit par toucher. Valéria Bruni-Tedeschi se montre en femme volontaire et cruellement indépendante. Tandis que Laure Calamy s’offre un beau contre-emploi. Et c’est finalement à la fois l’isolement de chacun des personnages et leur aptitude à l’aveuglement, que l’on retiendra en sortant de la projection de ce thriller en forme de jeu de pistes, à la construction si particulière et jouissive.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur