SEULE LA JOIE
Seule reste la déception
L’arrivée de Maria, une jeune femme queer et indépendante, dans une maison close de Berlin où Sascha travaille depuis plusieurs années va bouleverser sa vie. Si Maria est admirative de l’aisance de Sascha, cette dernière est très vite attirée par la jeune fille pour le meilleur… et pour le pire…
Prometteur par le traitement de la photographie et la gestion des cadrages, "Seule la joie" met ses qualités au profit d’un érotisme vulgaire. Pouvant rappeler "Love" de Gaspar Noé par ses scènes explicites, proche de la pornographie, son esthétique n’est pas suffisante pour rendre le film réellement intéressant. Si ces scènes permettent d’immerger le spectateur dans le milieu de la prostitution et dans cette monstration d’un corps comme objet de travail, la récurrence des scènes sexuelles face à un silence et une absence de profondeur des protagonistes ne rend pas honneur au sujet. La concrétisation de l’amour que se portent Sascha et Maria par une voie charnelle presque immédiate s’ajoute à cette omniprésence du sexe. Et la durée totale de ce type de scènes intimes et silencieuses équivaut à quasiment un tiers du film.
Malgré les bonnes intuitions qui se dessinaient, notamment sur les origines de Maria, le rapport avec son père et le fait qu’elle écrive des poèmes à la "Paterson", aucune d’entre elles n’est vraiment développée, laissant la profondeur du film en friche. Le carnet de poèmes n’est qu’une excuse pour accéder à la couche de Maria, ses origines italiennes un atout de séduction… Pourquoi est-elle venue en France ? Pourquoi appelle-t-elle son père régulièrement sans réponse de sa part ? Pourquoi ment-elle à ceux et celles qui l’entourent ? Autant de pistes esquissées et avortées pour une proéminence des scènes sexuelles.
De plus, la relation lesbienne que les deux personnages entretiennent apparaît plus comme un apport pornographique ou une façon de rompre avec le schéma hétéronormé de la prostitution, que comme une réelle relation. Si la jalousie de Sascha se comprend, les personnages et leurs vécus ne sont pas assez développés pour que l’on puisse ressentir des émotions à leur égard et s’insurger ou comprendre leurs actions. L’homosexualité, comme les sentiments ressentis, sont comme du vernis que l’on passe pour couvrir quelque chose, mais le fond reste apparent.
Adam GrassotEnvoyer un message au rédacteur