SEIZE PRINTEMPS
Rêver à hauteur d’adulte
Lorsqu’elle est au café avec ses camarades, Suzanne, 16 ans, boit tranquillement une boisson rose avec sa paille, et préfère ne pas parler. Elle semble même écouter distraitement la conversation. Elle croise le regard d’un homme en costume. Lors d’une soirée chez une copine, elle refuse une bière et s’abstient lorsqu’il s’agit de donner un avis ou mettre une note aux garçons. Elle s’ennuie avec ceux de son âge. Revenant autour du café, elle cherche à rencontrer cet homme qui a marqué sa mémoire, qui est en fait acteur au théâtre devant lequel elle passe tous les jours…
Le premier long métrage de Suzanne Lindon fait preuve d’une étonnante maturité. Âgée d’à peine vint ans, celle qui est la fille de Sandrine Kiberlain et Vincent Lindon, capture la rencontre de deux ennuis, celui d’une jeune fille de 16 ans, qu’elle interprète elle-même, et celui d’un homme de 35 ans, acteur de théâtre, auquel donne corps Arnaud Valois (révélé avec "Selon Charlie", et surtout connu pour son rôle dans "120 Battements par minute"). Captant à la fois les hésitations timides et les pulsions téméraires d’une adolescente en fleur, maladroite dans ses tenues vestimentaires comme dans les hasards qu’elle tente de provoquer, Suzanne Lindon met en scène avec justesse le désir d’une vie d’adulte et la peur d’aller trop vite.
Grâce à quelques scènes où une fantaisie chorégraphique s’invite dans le quotidien d’un petit déjeuner ou d’un verre en terrasse, elle donne à son film une réelle fraîcheur, se servant de la danse comme d’un éclat de joie ou un signe de connexion intime. Doux amer, porté par quelques chansons nostalgiques de Christophe, "Seize Printemps" respire cependant l’optimisme d’un début de vie, trouvant la juste place de parents bienveillants (même si inquiets), affichant juste ce qu’il faut de naïveté chez son héroïne, et faisant du personnage masculin une sorte victime de sa fleur de l’âge, entre charme inconscient et caractère forcément lumineux. Une belle ode à ce que la vie de cette jeune fille sera sans doute, une fois femme.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur