SANS ADIEU
Un documentaire bouleversant et saisissant sur le monde agricole
Au cœur des Monts du Forez, une galerie de portraits d’agriculteurs essayant tant bien que mal de survivre…
Présenté à l’ACID lors de l’édition 2017 du Festival de Cannes, "Sans Adieu" sort en salles dans un contexte particulier : le réalisateur et photographe, Christophe Agou, est malheureusement décédé en 2015. Les producteurs Pierre Vinour et Aurélie Bordier se sont alors lancés dans un parcours du combattant afin de trouver les fonds nécessaires pour terminer la post-production du documentaire. C’est notamment grâce à un financement participatif que les destins de Claudette, Jean, Christiane et les autres ont pu connaître un passage par le 7e Art. La caméra se pose au cœur des Monts du Forez, dans des chaumières où la poussière recouvre les murs, où les murs s’effritent et où les rayons du frigidaire se font désespérément vides. Car "Sans Adieu" raconte sur quinze ans l’effondrement d’un univers, celui du monde paysan où les petits éleveurs ne peuvent plus survivre, où la fatigue du dur labeur n’est rien face à l’épuisement dû au manque de considération de l’État.
Poignant et débordant de tendresse, le film capture l’intimité de ces êtres d’un certain âge dont les rides témoignent d’une époque révolue. Mais le métrage n’est pas une vulgaire lamentation ; bien au contraire, sobre et pudique, il est avant tout une célébration : celle de ces agriculteurs du passé, bien décidés à continuer le combat au présent à défaut de pouvoir rêver d’un futur. Les années défilent de fondus en fondus au noir, la douceur des âmes s’assombrit au fur et à mesure que le désespoir grandit. L’abandon est réel, la colère compréhensible. Que ce soit Jean-Clément contre cette décision d’exterminer son troupeau par mesure de précaution, ou Claudette qui hausse la voix sur les assistantes sociales pour bien faire entendre son désir de rester à domicile, chaque pan de vie est aussi déchirant qu’éloquent. « Sans adieu » aimait dire Claudette au réalisateur pour signifier qu’elle conte bien le revoir. C’est exactement cette même expression que l’on pourrait utiliser à la fin de la projection…
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur