SALT AND FIRE
2016 : la dégringolade de Werner Herzog
Oui, Werner Herzog est comme n’importe quel cinéaste : il peut rater un film. C’est extrêmement rare, il faut bien l’avouer, mais cela peut arriver. Cela dit, là, c’est quand même flippant, tant les voyants de l’aventure made in Herzog étaient tous au rouge. Imaginez donc : un tournage dans le désert de sel bolivien d’Uyuni (on y plafonne à 4000 mètres d’altitude !), un scénario allégorique à forte teneur écologique, un personnage d’industriel mégalo qui révèle sa fragilité… Tout était là et, à l’arrivée, rien ne fonctionne. Incompréhensible en matière d’enjeux et de structure narrative, le résultat passe en effet sans crier gare d’une prise d’otages lambda à un survival bêta pour finir par s’abîmer sur une fin particulièrement bizarre. Le tout entrecoupé de dialogues grotesques (pourquoi en arriver à la scatologie ?!) et d’une direction d’acteurs proprement calamiteuse.
Tout le monde, d’un Michael Shannon généralement excellent à une Veronica Ferres toujours pas très connue (et ça ne va pas s’arranger), défie ici les limites de l’insignifiance en matière d’actorat, récitant ses répliques sans trop y croire, singeant son personnage au lieu de l’incarner et prenant la pose dans de vastes décors solaires en oubliant les pages du scénario. Le virage à 180° de l’intrigue vers un postulat de survival à la "Gerry" aurait pu renforcer le propos, mais ne fait au contraire que l’alourdir par des symboles pesants qui ne donnent même pas envie de rire. Que dire de plus, sinon que l’échec est total ? On peut quand même souligner que Herzog a visiblement bien aimé tourner dans le désert de Bolivie – il en a tiré quelques jolis plans. Hélas, pour une fois, il a oublié d’y bâtir une vraie fiction.
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur