LA SAISON DU DIABLE
Un Lav Diaz chanté, en hommage aux victimes des milices
Après avoir remporté le Lion d'or en 2016 pour "La femme qui est partie", le Philippin Lav Diaz nous propose un film dont l'action se situe après 1977, alors que 70 000 civils ont été armés pour appuyer le pouvoir en place et terrorisent la population. Un hommage en chansons, ou plutôt en dialogues chantés (souvent répétitifs), de près de 4 heures, relatant notamment la lutte d'une jeune médecin pour maintenir un hôpital de campagne. Ces chansons, Lav Diaz les a écrites alors qu’il tournait ses films de gangsters, comme « des marches funèbres pour [son] pays », lui donnant ainsi l’idée de raconter cette période, qu’il a connue, par ce prisme là.
Tourné en Malaisie, pour des question de sécurité (le film parle de la police, omniprésente aux Philippines), le film regroupe principalement des acteurs de théâtre, familiers de la comédie musicale. Certaines chansons sont certes très belles (celle préalable au poème politique au début du film...), mais les dialogues chantés font peu avancer l'histoire et ralentissent encore un cinéma devenu poseur, créant de nombreuses longueurs injustifiées et amenuisant certaines tensions. Heureusement, l'incomparable esthétique noir et blanc de l'auteur reste intacte et nous offre quelques plans mémorables, alors que le récit convoque dans une structure peu claire folklore païen et figures mythologiques de la culture occidentale (Narcisse), autour de personnages en résistance. Un film complexe qui aura sans doute bien du mal à trouver un public.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur