LA ROUTE
Savoir faire confiance à nouveau
Dans un monde dévasté par un gigantesque incendie, où le ciel n’a plus rien de bleu, où l’essence est devenue une denrée plus que rare, un homme et son fils tentent de survivre, suivant une route, et se méfiant de tous ceux qu’ils peuvent croiser…
John Hillcoat signe l'adaptation du roman culte "The road" (Cornac McCarthy) et nous embarque sans difficultés dans un monde post-apocalyptique, sur les traces d'un homme (Viggo Mortensen, imposant de terreur et de violence contrôlée) qu'on découvre vite sur-protecteur avec son jeune fils. Mais dans ce monde fait de terres dévastées, ponctuées d'explosions sourdes et lointaines, d'incendies incontrôlés, ou d'amas de cendres, les repères sont forcément différents. Et le réalisateur s'applique à donner corps à des angoisses quotidiennes qui semblent bien loin de notre réalité.
Car ici point d'abri, point de nourriture abondante, point de facilités liées à l'énergie. Le néant et l'absence de perspectives sont le quotidien de survivants qui à force de manquer de nourriture, en sont pour quelques uns au moins, devenus cannibales. Certains diront en apercevant les hordes d'égoïstes sanguinaires regroupés en bandes, qu'il s'agit là d'un "Mad max" réaliste. D'autres penseront qu'Hillcoat a réussi là où Haneke avait échoué avec son "Le temps du loup", en décrivant à la fois un nouveau monde angoissant, dépourvu des basiques auxquels nous sommes habitués, tout en montrant la régression à l'état de bête dont l'homme peut être capable.
Mais il n'y a pas que l'homme qui soit ici une menace. Hillcoat réussit d'ailleurs à merveille une scène de tremblement de terre, relativisant la dangerosité de la nature et celle de l'homme. Et au final la force du film, hormis son interprétation sans faille, réside dans le fait de poser les bases d'une réflexion passionnante sur la possibilité d'un apprentissage ou d'une utilité du bon et du mal dans un tel environnement. Comment faire confiance à l'autre à nouveau quand l'homme devient une menace récurrente ? Comment avoir encore un avenir, une envie, dans un monde sans lumière, où même la nature n'est plus de notre côté ? Comment enseigner les notions de bien et de mal ? Ce sont quelques pistes que "La route" nous propose, comme pouvait le faire également l'excellent "Children of men", histoire de vous torturer l'esprit pendant quelques temps.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteurLa route que suivent inlassablement ce père et son fils est à l’image du film de John Hillcoat : longue et pénible. Malgré des décors et une photographie tout à fait remarquables, et en dépit d’une mise en scène dramatisante à souhait, “La route” souffre d’un cruel manque de relief et d’émotion. Viggo Mortensen, acteur pourtant incroyable, révélé par David Cronenberg (dans les très bons “A History of Violence” et “Les Promesses de l’Ombre”), ne parvient pas à donner vie à son personnage, un homme gris, aux gestes répétitifs dont on discerne à peine le visage.
Les quelques vaines tentatives de créer du suspense ou de la tension ne suffisent pas non plus à susciter l’inquiétude ou la compassion autour de la destinée des deux héros. Les péripéties se succèdent et se ressemblent, sans jamais réussir à épaissir l’histoire. Même la dimension apocalyptique du film, qui constitue pourtant son principal intérêt, peine à s’exprimer face à tant de monotonie. Résultat : l’ennui nous gagne peu à peu, suivi du désarroi.
Sylvia GrandgirardEnvoyer un message au rédacteur