ROUTE IRISH

On pouvait croire que Ken Loach allait nous offrir, par le biais de ce film, une critique acerbe de la privatisation de la guerre. Ce dernier film très attendu et présenté in extremis dans la compétition officielle de Cannes fut, autant l'avouer de suite, une sacrée déception pour les aficionados du réalisateur britannique. On y évoque pourtant des thèmes intéressants tels que l'impact psychologique de la guerre, les comportements à la limite de la morale des sociétés de sécurité en territoires belligérants, ou encore le deuil d'une relation fraternelle (ici entre Fergus et Frankie).

Hélas, toutes ces thématiques, sont traitées avec parcimonie, voire à peine survolées. Loach préfère se concentrer sur le sentiment revanchard que ressent Fergus. Mark Womack, qui interprète le personnage, reste le principal intérêt du film. L'acteur injecte une puissance vocifératrice et vénéneuse mettant en exergue les agissements borderline du protagoniste. Fergus n'accumule que des ouï-dires et ne construit son enquête qu'afin d'assouvir sa soif de vengeance, soif que l'on ne partagera jamais. Malgré l'investissement de Womack, qui a, du coup, plutôt l'air d'un Jack Bauer sorti d'Irak, l'émotion n'émerge jamais. On a plus l'impression d'être devant un médiocre blockbuster à la Greengrass, que d'assister à la projection du dernier Ken Loach.

Cela est vraiment dommage, car on sent bien qu'il a quelque chose à dire sur le sujet des "contractors". Mais en s'évertuant à nous emmener aux confins d'une enquête stérile et finalement ultra-prévisible, Loach accouche d'un long métrage plutôt commun. Vivement le prochain, pour nous faire oublier tout ça !