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RÊVES VOLÉS

Un film de Sandra Werneck

La légèreté comme remède au drame

Jessica, Daiane et Sabrina sont trois adolescentes habitant une favela à la périphérie de Rio de Janeiro. Pour faire face à la misère, elles se tournent vers la prostitution occasionnelle sans toutefois renoncer à leurs rêves et tentent de garder le sourire malgré leurs problèmes respectifs : Jessica doit s’occuper de son grand-père malade tout en élevant sa petite fille, Daiane se débat entre un oncle trop entreprenant et un père dont elle aimerait gagner l’amour, tandis que Jessica tombe amoureuse d’un trafiquant de drogues. A elles trois, elles forment un trio à l’amitié indéfectible qui refuse de se plier à un destin tout tracé.

Après « Teen Mothers », un documentaire sur les grossesses précoces dans les banlieues pauvres du Brésil, Sandra Werneck a choisi d’adapter le livre d’Eliane Trinbade : « Les filles du coin : journal sur les rêves, les épreuves et les aventures de six ados au Brésil ». Ramenant le nombre de protagonistes à trois en ne gardant que les moments les plus intéressants du livre, la réalisatrice nous livre un film bref et intense, malgré quelques baisses de régime dans l’avancement du récit.

Touchant par son universalité (ce qui se passe dans le film pourrait tout aussi bien se dérouler dans n’importe quel point du globe où sévissent la pauvreté et les inégalités sociales), le discours de « Rêves volés » est transcendé par un regard de metteur en scène bienveillant et plein de tendresse envers ses héroïnes, privilégiant de cette façon l’amitié et la solidarité au drame pur et dur. Ainsi, la réalisatrice brésilienne contourne avec une certaine habileté le glauque et le sordide tout en ouvrant grands les yeux sur la misère, les désillusions et les humiliations d’une génération vivant au jour le jour, faute de pouvoir se projeter dans un futur proche ou lointain.

Grace à ce traitement tout personnel, on a vite fait de s’attacher à ces trois jeunes femmes, trio inséparable qui s’entraide dans la joie et vend son corps pour tenter de faire face à une exclusion sociale jouée d’avance. En parlant de choses graves (la pédophilie, les grossesses adolescentes, les problèmes familiaux) avec légèreté, Sandra Werneck se taille d’emblée un statut d’auteur et malgré quelques défauts de construction, son métrage est une belle alternative entre le cinéma brésilien de Fernando Meirelles (« La Cité de Dieu », « Blindness ») et celui de Walter Salles (« Central do Brasil », « Carnets de voyage »).

Christophe HachezEnvoyer un message au rédacteur

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