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RESVRGIS

Une partie de chasse dont on se serait bien passé

Sara et ses amis ont comme tradition de partir ensemble chasser en forêt. Mais il semble que cette fois ils soient tombés sur un prédateur de taille…

On avait un bon pressentiment sur ce film là. Un survival réalisé par un italien dans les forêts de son pays natal avec un groupe d'amis traqué par… quelque chose : évidemment qu'on est friand de ce genre de proposition. On peut penser à "The Descent" de Neil Marshall, "Le rituel" de David Bruckner ou encore quand on voit le décor de chasse, à des classiques comme "Razorback" de Russel Mulcahy sorti en 1984. Premier constat, le metteur en scène italien avait lui aussi ces références en tête lors de l'écriture et s'est appliqué à les retranscrire sans trop de passion avec une mise en scène portée, mais sans intention particulière. On baigne dans le gris tout du long.

On sent pourtant dans les intentions une ambition de montrer que ce genre n'est pas que le domaine d'expertise des productions anglo-saxonnes. Un tournage en conditions réelles, dans l'humidité et le froid de ces grands espaces et un monstre fait de prothèses et non d'effets spéciaux : on sent la volonté de pas avoir les yeux plus gros que le ventre compte-tenu du budget du film. Cependant les personnages posent souci. Quand "The Descent" (encore lui) est souvent mentionné comme un chef d’œuvre du genre, c'est surtout et avant tout grâce à l'écriture de cette bande de filles portant un gros secret. Entre l'interprétation et le non-cynisme du traitement, notamment de la meilleure amie qui devient antagoniste, le film de caverne de Neil Marshall fonctionnait sur la peur car on avait véritablement peur pour nos héroïnes, aussi perfectibles (humaines ?) soient-elles.

Triste de constater qu'ici on en oubli de nous rendre attachants ou seulement compréhensibles les personnages du film. Ainsi l'ex-petite amie qui est, avant-même que le carnage ne commence, est juste exécrable (l'excuse du deuil est une facilité d'écriture pour justifier le caractère mal défini et grossier d'un personnage). Et Sara, notre héroïne rongée par la culpabilité, finalement n'évolue pas tant, quitte à s'enfermer dans sa résolution avec un message bien simple pour dénouer tout ça. Il ne suffit pas de sexualiser les couples de lesbiennes avec pour chaque bisou 3 kilomètres de langue (alors que les couples hétéros paraissent bien puritain à côté) pour caractériser des personnages : on pourrait croire que c'est une manière qu'a l'ex-petite amie de rendre jalouse Sara, mais non. Jamais le film n'étoffe quoi que ce soit et pourtant il prend le temps de ne rien raconter. Un comble mesdames et messieurs, un comble avec une durée d'une heure et demie au compteur qui en paraît le double.

Alors certes, une scène d'étranglement particulièrement viscérale et réussie montre que le jeune metteur en scène sait cadrer, sait instaurer une ambiance (la brume, les bois, certains moments de tension), mais il ne le fait que partiellement. En introduction, lorsqu'il a présenté son film sur scène, au Festival de Gérardmer, il expliquait la difficulté de se faire produire en Italie aujourd'hui pour du film de genre. On imagine bien le combat titanesque qu’a dû mener le cinéaste pour arriver à ses fins, mais triste est de constater que le projet a accouché d'un pétard mouillé. Dès lors qu'on nous révèle le design du monstre et l'éternelle justification du pourquoi du comment, notre immersion est cassée et on sait où tout ce petit monde se dirige.

Que l'on cite certaines œuvres pour rendre hommage pourquoi pas, mais le film croule sous ses influences visibles à chaque plan (coucou "Le Loup-garou de Londres" de John Landis). Qu'on décalque ce qui se fait ailleurs pour être chauvin et faire ça dans ses contrées ? Pourquoi pas, mais rien n'éveille l’intérêt de l'habitué de ce genre de film. Il serait temps de lâcher les chiens quand on s'attaque au survival, d'arrêter cette fausse retenue et de dévoiler les choses qui rendent le tout bien inoffensif. Quitte à s'inspirer par exemple de "La Traque" de Antoine Blossier sorti en 2011 (présent cette même année au festival Gérardmer, tiens tiens) qui prenait à bras le corps le concept de quatre personnages en chasse avec des troupes de sangliers un peu trop robustes. Le film se permettait même de faire une allégorie entre ces animaux et les membres de la famille qui compose le film : tous étaient des porcs, tout au moins les premiers étaient nés comme ça. Cela n'empêche pas qu'on sera curieux de voir les prochaines propositions du bonhomme. Promenez-vous donc dans les bois, promis il ne s'y passera pas grand chose et vous en ressortirez indemne.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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