LA RÉSISTANCE DE L’AIR
Un premier film bancal et inégal
Il y a comme l’ombre de Jacques Audiard qui plane sur ce film mis en boîte par son assistant-réalisateur sur "Un Prophète" et écrit par son fidèle scénariste Thomas Bidegain. Même dans le pitch, on sent que le disciple Fred Grivois veut s’inspirer de son maître pour donner vie à un drame noir et un polar abrupt. Car l’histoire est celle d’un monsieur Tout-le-monde s’enfermant dans un engrenage criminel dont il ne comprend ni les codes ni les enjeux. Vincent menait ainsi une vie paisible, marquée par des soucis financiers dus aux travaux de sa nouvelle maison. Progressivement, le manque d’argent finit par ronger son couple et gangréner leur amour. Quand un mystérieux nouvel ami lui propose d’exploiter ses aptitudes extraordinaires au tir, l’homme se laisse tenter.
Hésitant entre le thriller psychologique et le film de mafieux, "La Résistance de l’air" est un métrage d’ambiance, un film gris où l’atmosphère anxiogène étouffe le spectateur, l’obligeant à rester sur ses gardes. Calmement et méticuleusement, le cinéaste croque le parcours d’un homme sacrifiant ses vertus morales pour son devoir familial. Et c’est précisément dans ce réalisme social qui rejette le spectaculaire que ce drame est le meilleur, bien aidé par des comédiens impeccables. Sauf qu’au lieu de se limiter à cette approche, le réalisateur s’est perdu dans des velléités de grand spectacle, recourant à des raccourcis et des clichés qui polluent son récit (sérieusement, les scènes de mafieux dans les boîtes de nuit ?).
Il y avait pourtant un postulat très intéressant : si on vous proposait de tuer un inconnu en ayant aucune chance d’être attrapé et avec une très grosse récompense à la clé, que feriez-vous ? Lorsque l’objectif se focalise sur la culpabilité de cet homme et rejette la violence en hors-champ, "La Résistance de l’air" laisse transparaître sa puissance dramatique. Mais probablement par manque de confiance, le parti-pris n’est pas totalement assumé, condamnant l’œuvre à exister dans un entre-deux non maîtrisé entre le portrait d’un homme abandonné par tous et la chronique policière classique. Au final, la cible est manquée…
Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur