RAOUL TABURIN A UN SECRET
Si Sempé avait fait du cinéma, ça aurait sans doute ressemblé à ça
Raoul Taburin est réparateur de vélos. Il jouit d’une certaines réputation dans son petit village de Saint-Céron. Mais il cache un terrible secret, susceptible de ruiner sa réputation : il ne sait pas faire de vélo…
Ne pas savoir faire de vélo n’est pas forcément un problème, comme en témoigne dans le film Hervé Figougne (Edouard Baer). Cela devient un problème quand on a toujours voulu savoir en faire et que contre son gré, on a obtenu la réputation de casse-cou à vélo. Dès lors, c’est l’effet boule de neige, le secret grossit et se met à être au cœur de toute l’existence. L’art du « quant à soi » ronge tout.
C’est ce qu’ont bien compris Pierre Godeau, réalisateur-adaptateur et Guillaume Laurant, scénariste. Ils ont repris le cœur du travail de Sempé tout en faisant un vrai travail de création. Cette adaptation est riche car elle est interprétative. Plutôt que de rester fixée au modèle, c’est une transposition qui utilise pleinement le média cinématographique, avec une voix-off, des effets spéciaux, des jeux sur les palettes de couleurs et les bruits, sur le mouvement et sur l’expressivité des acteurs. Plus qu’adapter une histoire, Pierre Godeau porte à l’écran l’esprit de Sempé, ce que n’avait pas vraiment su faire les précédentes adaptations du dessinateur.
Le casting est également très pertinent et, magie du cinéma, Benoît Poelvoorde est un très grand fan du dessinateur. Il connaissait le livre sur le bout des doigts en plus de s’avèrer un Raoul Taburin naturel. Sa complicité avec Edouard Baer fonctionne très bien à l’écran. Les excentricités d’improvisation de l’acteur lors des séances de portraits sont très amusantes. L’extension de son personnage, comme celui de Suzanne Clément, dans le rôle de Madeleine la femme de Raoul, viennent très bien servir l’histoire et sont un apport vraiment bénéfique. Là où l’œuvre de Sempé était plus légère, plus poétique, le film devient une fable émotionnelle forte.
Mais attention, il s’agit d’un petit film, d’un tout petit film, touchant et à la portée de tous. Un film qui donne envie de sourire, qui captivera les petits et les grands. Ce film s’adresse à l’enfant qui est au cœur de chacun de nous. Comme une jolie petite réussite, suspendue.
Thomas ChapelleEnvoyer un message au rédacteurBANDE ANNONCE
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COMMENTAIRES
Tara
lundi 1 mars - 10h48
Oui, c’est vrai le film peut passer pour « facile ». Et pourtant, si l’on y réfléchit combien de secrets empoisonnent la vie d’un grand nombre d’entre nous ? Par ailleurs, il évoque aussi la peur de la différence : ne pas être un enfant comme les autres peut nous blesser à vie. Alors, vaut-il mieux cacher ce secret que je ne saurais voir ? Ou dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ? Admettre un de ses points faibles est souvent difficile voire impossible. Sauf que… Raoul Taburin a su transformer son handicap en atout. Benoit Poelvoerde le magnifie… Qu’espérer de mieux pour passer un bon moment moins léger qu’il n’y paraît et plus intelligent… qu’il n’y paraît !