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Ciel bas pour tout le monde
Le scénario du nouveau film de Bouli Lanners ("El Dorado", "Les Géants") se construit d'emblée sur un double mystère : ‘le motif’ pour lequel deux hommes de main cherchent un téléphone portable et ‘la personne’ que vont voir le couple de SDF. Déracinés, tous ces personnages trimbalent leurs phobies ou leurs problèmes existentiels dans un no man's land livré à des gens peu scrupuleux (les clients du bar routier, les hommes d'affaires, les SDF sortis de nulle part...).
C'est la somme de ces rencontres et des hasards entremêlés qui fera le sel de cette comédie plus dramatique et désenchantée que drôle. Du SDF nommé Jésus, qui en se prenant une balle possède tout à coup des stigmates et un soudain trou dans la paume de la main, au téléphone qui passe de main en main, sans jamais vraiment servir à personne, si ce n'est à assurer les ressorts du scénario lui-même.
On suit donc le duo Lanners/Dupontel avec curiosité, au milieu de décors savamment exploités pour leur aspect graphique (des ruines de hangars, les plaines de la Beauce, les vestiges de la ligne d'aéro-train imaginée par Giscard dans les années 70...). Et l'émotion se pointe au tournant d'un discours inattendu sur la peur de mourir seul ou sur la maladie.
Au milieu de personnages sans pitié, ce sont finalement deux vieillards (Michael Lonsdale et Max Von Sydow) qui sont chargés de nous rappeler fort justement que "vivre ça n'est pas seulement respirer". Cette œuvre empruntant beaucoup dans sa forme au western moderne, trouve alors son chemin philosophique et humaniste, au-delà de la comédie cynique qu'elle semble être initialement.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur