POUR ELLE
Un superbe thriller qui est aussi une magnifique déclaration d’amour !
Julien et Lisa vivent heureux à Paris avec leur fils unique, Oscar. Un jour, leur vie bascule quand la police interpelle Lisa en l’accusant de meurtre. La justice confirme sa culpabilité et Julien et Oscar rendent visite à Lisa en prison, qui dépérit peu à peu. Julien a soudain envie de tenter l’impossible…
Amour sans borne et thriller haletant, voici les deux dominantes de ce premier long-métrage de Fred Cavayé (déjà remarqué pour ses courts-métrages) qui fera date dans le cinéma français. On parle beaucoup de Vincent Cassel en Mesrine, on pourrait en dire tout autant de l’autre grand Vincent de notre cinéma hexagonal : Lindon, qui en Julien amoureux fou de sa femme Lisa, va tout tenter pour la sortir de prison… en essayant de la faire s’évader !
L’histoire choisit magistralement de se focaliser sur cet homme qui n’a plus droit au doute et qui va devoir aller au-delà de tout ce qu’il aurait pu imaginer. Il tire un trait sur sa vie, qu’il considère de toute façon anéantie depuis le jour où on lui a pris sa femme, et décide de transgresser toutes les règles qu’il s’était fixé jusque là. Le film prend donc un tournant inattendu qui ne déplairait pas à de grands studios américains. Le cinéma US adore, en effet, ces films où un monsieur-tout-le-monde bascule du jour au lendemain en monsieur-espion-limite-bandit pour sauver sa peau ou celle de ses proches. Il est vrai que notre cinéma bien de chez nous n’a que rarement l’occasion de nous offrir ce genre de spectacle.
Ici, justement, le spectacle est garanti. La tension va crescendo et on se demande jusqu’au bout si ce mari ne va pas trop loin, s’il se rend bien compte de ce qu’il fait… s’il n’est tout simplement pas devenu complètement fou ! Mais qu’importe, à partir du moment où il croit sa femme innocente d’un meurtre que la justice veut lui mettre sur le dos, lui est prêt à devenir coupable pour sortir celle qu’il aime et que le destin à condamner à vie.
L’amour est le maître-mot de cette histoire policière. L’amour est l’inspiration première de celui qui n’était que prof de français au début du film et qui devient bien malgré lui notre héros à mesure que l’intrigue progresse ! L’amour et le drame ont rarement été aussi bien entremêlés au cinéma. C’est brut, c’est fort, c’est intense, c’est palpitant. Il y a deux ans, Guillaume Canet sortait un film d’un calibre assez identique : « Ne le dis à personne ». Avec « Pour elle », le thriller à la française montre qu’il n’a rien perdu de sa superbe.
Ici, le film est réussi, grâce à un scénario intelligent qui n’a pas eu peur des ellipses pour se concentrer sur l’intrigue centrale. Il est réussi, grâce à une réalisation efficace et léchée qui met autant en valeur les silences entre un fils et son père que les courses poursuites entre policiers et fuyards. Il est réussi, grâce à un montage habile qui sait quand il faut manipuler le spectateur. Il est enfin réussi, grâce à des comédiens hors pairs : Vincent Lindon se déchaîne comme jamais, Diane Kruger en impose avec un minimum de scènes et le jeune Lancelot Roch, leur fils, est formidable dans la peau d’Oscar. Mais commençons plutôt d’abord par les César ! Ce serait bien mérité.
Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteurLe personnage de Julien va évoluer en crescendo, passant de l'homme ordinaire et cultivé à une véritable « bête féroce », prêt à tout par amour. Julien va passer trois ans de sa vie à élaborer un plan d'évasion, totalement focalisé sur son but et sans mesurer les conséquences en cas d'échec. La présence de son fils le ramènera d'une certaine façon à la réalité.
Ainsi, confronté à une situation hors du commun, jusqu'où l'homme est-il capable d'aller ? Bien qu'étant un thriller, le sujet principal du film repose donc sur l'humain et la passion amoureuse. Le film aligne de nombreuses scènes d'actions, intenses, laissant pourtant place à quelques rares mais beaux moments de répit: les retrouvailles de la famille à la prison, et aussi, cette belle scène où Oscar se réveille en pleine nuit pour aller dormir tout contre son père. On retrouve ainsi tout au long du film ce contact humain entre les trois personnages, séparés à la fin de chaque visite par les murs de béton de la prison.
Fred Cavayé signe ici un beau premier film, au rythme haletant et au scénario bien mené. Vincent Lindon et Diane Kruger s'immiscent parfaitement dans leurs personnages: Lindon dégage courage et fragilité, et Diane Kruger réussit à casser son image de star hollywoodienne en incarnant une femme brisée, à la fois forte et maternelle. A noter que la complicité construite durant le tournage entre Fred Cavayé et l'acteur Vincent Lindon les conduira d'ailleurs probablement à une prochaine collaboration...
PITAUD Anne
BENITAH Eliette