LA PLANÈTE DES SINGES : LES ORIGINES
Le jour d'avant
San Francisco, de nos jours. Le chercheur Will Rodman tente d’éradiquer la maladie d’Alzheimer en testant un sérum sur une femelle chimpanzé. Après un incident, la progéniture de celle-ci est récupérée et élevée par Will au sein de sa propre maison, où habite également son père, atteint lui-aussi de la maladie. En grandissant, le singe baptisé César deviendra de plus en plus intelligent. Mais suite à une agression sur un voisin, Will est forcé de faire enfermer César dans un refuge pour primates…
C’est la mode des « commencements ». Et après avoir redémarré ses "X-Men" avec un certain bonheur, la Fox aura plongé dans son répertoire pour redonner vie à une autre saga culte : "La Planète des singes", initié en 1968 par Francklin J. Schaffner. Un classique du genre, porté par le grand Charlton Heston et dont la célèbre image finale aura traumatisé plus d’un cinéphile. Quatre séquelles inégales, une série TV animée japonaise et un remake en partie raté plus tard, voici que l’on nous propose de revenir au commencement de tout. Quand les singes prirent le pouvoir…
Passons rapidement sur les défauts, certes visibles et parfois rédhibitoires, finalement tous imputables au statut de blockbuster d’été du film. Ils concernent principalement toute la bestialité et la violence inhérentes au sujet du film, dont le traitement tout public affaiblit parfois l’impact de certaines scènes. On peut aussi noter une histoire d’amour aussi inutile que mal gérée (ben ouais, c’est pas James Franco l’acteur principal du film !), et quelques raccourcis maladroits (quid de la « fiancée » de Ceasar ?), sans doute obligatoires à une production de cet acabit.
Des menus défauts, donc, qui finalement n'entachent en rien le formidable pouvoir d’attraction du film. Malin, le scénario se permet quelques clins d’œil attendrissants (Heston à la télé, une réplique de la Statue de la Liberté), au cœur d’un incroyable récit de pure science-fiction. Mené tambour battant durant la majorité du métrage, l’intrigue de ces "Origines" se joue de la suspension d’incrédulité nécessaire à ce type d’histoire, laissant voir le temps de quelques plans-séquences hallucinants le talent du jeune Rupert Wyatt, notamment lors d’une virée en pleine forêt faisant s’enchaîner les saisons et la croissance de Caesar (incroyable moment d’une rare poésie), ou lorsque l’armée des singes se lance à l’assaut du Golden Gate.
Entre ses réflexions poussées sur la construction d’une personnalité propre (enfance/apprentissage, adolescence/rébellion, âge adulte/affirmation de soi), ses postulats de SF jouissifs et assumés comme tels (la propagation d’un virus mortel à l’homme, mais bénéfique au primate) et sa mise en scène intuitive et immersive (la libération de ses congénères par un Caesar charismatique en diable), "La Planète des singes : les Origines" propose également une identification à ce jour inédite, faisant de Caesar le véritable protagoniste du film. Tant pis pour Franco (très bon) et ses camarades, Andy Serkis s’impose comme un acteur de premier plan, comédien d’un genre nouveau pour qui la performance capture tient lieu de véritable outil de travail. C’est grâce à lui, et aux magiciens de Weta, que la réussite est là, tant il donne à son rôle une intensité (ce regard, par Zaïus) et une humanité inattendue (voire la magnifique relation qu’il entretient avec son « grand-père », campé par l’émouvant John Lithgow). C’est son histoire qui est ici contée, celle du chimpanzé qui se sera élevé au-dessus de sa condition pour atteindre le statut d’icône.
Loin d’être parfait, ce reboot à priori fantaisiste s’impose dès lors comme le meilleur blockbuster de l’année, et une surprise comme on en voit peu. Hail to Caesar, et que son règne vienne !
Frederic WullschlegerEnvoyer un message au rédacteur