PAULINA
Qui est Paulina ?
Alors que son père – un juge haut placé – la destinait à une carrière d’avocate, Paulina, 28 ans, décide de se consacrer exclusivement à l’enseignement dans une petite région défavorisée d’Argentine. Mais le décor se révèle hostile, les élèves peu motivés et, surtout elle est violemment agressée, un soir, par une bande de jeunes parmi lesquels elle reconnaîtra vite certains de ses élèves. Pour ne rien arranger, elle se découvre enceinte quelque temps après. Doit-elle garder cet enfant issu d’un viol ou opter pour un avortement ? Le choix de Paulina va susciter l’incompréhension de son entourage…
Voilà bien la question que l’on se pose pendant tout le film, et plus encore lorsque débute le générique de fin. Nul doute que l’intention du cinéaste Santiago Mitre résidait dans le fait de filmer une héroïne complexe, oscillant entre l’idéalisme et l’inconscience, sans jamais chercher un équilibre rassurant. Le souci, c’est que "Paulina" ne suscite aucun trouble, et ce en raison d’une narration qui montre vite ses limites. D’abord en ce qui concerne ce fameux viol, répété à deux reprises selon un point de vue différent (d’abord celui de Paulina, ensuite celui des agresseurs) alors qu’un montage alterné aurait été largement plus justifié. Ensuite en ce qui concerne la mise en scène, certes très soignée à l’image de nombreuses pellicules latino-américaines récentes ("Sin nombre", pour citer un très bel exemple) mais relativement prévisible dans ses choix de cadre et de découpage. Le plan-séquence pour les situations tendues entre le père et la fille, le champ/contrechamp pour les autres échanges, le plan fixe pour les extérieurs, etc. Tout y est. Rien ne dépasse. Mais du coup, rien ne surprend.
On en revient alors sur le cas de l’héroïne, clairement le vrai gros souci du film. Qui est réellement Paulina ? Une figure quasi christique acceptant de prendre sur elle un acte horrible afin d’éviter de nouvelles vies gâchées ? Une jeune rebelle soucieuse de prendre l’avantage sur un père influent et quasi donneur de leçons ? Une idéaliste à la psychologie dure comme de la roche ? Une simple idiote ? En choisissant de ne pas trancher, Mitre fait hélas un choix fatal : l’absence de ligne directrice pousse son film à se vider de tout son potentiel subversif et, surtout, l’éparpillement de ces hypothèses sans un contrepoint symbolique intégré à l’image (on le répète, la réalisation est très prévisible) en arrive à toutes les annuler jusqu’à faire ressembler le film à une coquille relativement vide. Pour le coup, c’est triste. Il y avait vraiment du potentiel là-dedans…
Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur