PAS PAREIL… ET POURTANT !
Un plaidoyer tendre en faveur de la diversité
Un mouton noir, une corneille blanche, un moineau et un avion de papier, un renard et un oisillon. Au fil de quatre courts métrages, ces personnages explorent la thématique de la différence…
Ce programme est constitué de quatre courts métrages d’animation sans paroles, provenant d’horizons divers et utilisant des esthétiques et techniques variées.
Tout commence avec une production germano-suisse, "Noir et Blanc" (5’30), dans laquelle Jesús Perez et Gerd Gockell mettent en scène un troupeau de moutons rejetant l’un des leurs à cause de la noirceur de sa laine. La métaphore du mouton noir, qui est utilisée dans de nombreuses langues, est ainsi exploitée de façon limpide pour les enfants, avec une histoire simple démontrant qu’un individu subissant des discriminations a parfois besoin de faire plus d’efforts que les autres afin d’être accepté par un groupe. Le trait épuré en noir et blanc est accompagné, comme dans la cultissime série "La Linea", d’une mise en scène de la main du dessinateur (astuce dont les réalisateurs sont coutumiers, l’ayant notamment utilisée dans le joli "Cats and Dogs" en 2016). Cette main vient créer les personnages, interagir avec eux tel un immense berger démiurge (les poussant ou les faisant glisser sur la feuille), ou encore allumer et éteindre une lampe de bureau qui fait office de soleil. Voilà donc une belle entrée en matière, parfaite pour parler du racisme avec les plus jeunes.
Le programme se poursuit avec une thématique identique mais des couleurs inversées, avec "La Corneille blanche" (9’), film croate réalisé par Miran Miošić. Comme le titre l’indique, une corneille aux plumes blanches est difficilement acceptée par ses congénères, constamment victime de railleries et d’humiliations, malgré ses aptitudes. Variation du "Vilain Petit Canard", cette animation 2D est plus enfantine dans la forme et moins enthousiasmante mais elle est tout de même jolie à voir et le message passe également bien. On appréciera notamment la conclusion multicolore, véritable ode à la diversité et au multiculturalisme, en forme de pied de nez aux moqueries racistes.
En troisième position, le film allemand "Le Moineau et l’Avion de papier" (11’) de Christoph Englert, est un cran en-dessous. L’animation 3D est techniquement réussie (on notera que la capacité à faire vivre l’avion en papier, malgré une expressivité limitée, n’est pas sans rappeler le célèbre "Luxo Jr." de Pixar) mais on reste perplexe sur la pertinence de ce choix au sein de ce programme (l’associer à la thématique de la différence est un peu tiré par les cheveux), sur quelques éléments ringards de stéréotypes fille-garçon et surtout à propos d’un scénario dont on peine à saisir le sens (d’où vient cet avion ? pourquoi aide-t-il l’oisillon ?...). C’est sympathique mais oubliable.
Heureusement, vient ensuite une magnifique production belgo-suisse, "Le Renard et l’Oisille" (12’) de Frédéric et Samuel Guillaume (auteurs d’un long métrage, "Max & Co", en 2007). Mêlant images de synthèse et décors naturels à la manière de "Minuscule", ce récit imagine une relation impensable et immensément tendre entre un renard famélique et un petit oisillon bleu aux immenses yeux noirs, dans une forêt où les méchants sont de gigantesques castors aux allures de trolls. La poésie domine dans le langage non verbal qui se développe entre ces deux protagonistes que tout semble opposer mais qui finissent par s’entraider et se compléter. Une belle et émouvante leçon de vie pour clore un programme inégal mais globalement admirable.
Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur