ORANGES AND SUNSHINE
L’assistante des enfants perdus
Dans les années 80, Margaret Humphreys est assistante sociale à Nottingham. Elle anime des réunions d’écoute à l’intention des personnes ayant été adoptées. Un soir, elle est abordée par une femme qui lui raconte qu’enfant, les services sociaux britanniques l’ont expatriée en Australie à l’insu de sa famille…
Digne héritier de son père Ken, Jim Loach s’engage, avec ce premier film, à dénoncer les dérives politiques aux conséquences sociales désastreuses. Avec l’adaptation du livre de Margaret Humphreys «Empty cradles», il rapporte l'un des plus grands scandales britanniques du XXe siècle : la déportation d’enfants sans le consentement de leur famille. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, le gouvernement affréta des bateaux pour envoyer ses orphelins en Australie, au Canada et autres pays du Commonwealth où l’éducation d’un pupille était bien moins onéreuse qu’au Royaume uni. 150 000 enfants sont donc partis peupler les institutions du bout du monde. Or près de 10 000 d’entre eux avaient une famille. Des parents qui, ne pouvant plus subvenir aux besoins de leurs enfants, les avaient placés provisoirement en orphelinat. Quand ceux-ci voulurent retrouver leur progéniture, on leur annonça qu’ils avaient été adoptés par de riches familles comblant tous leurs besoins. Aux enfants, on affirma que leur parents étaient morts.
Il s'agit là d'un sujet grave que Jim Loach aborde de façon bien scolaire. Hésitant entre documentaire et récit, il se laisse submerger par la noblesse du traité et nous offre un film bien lisse, sans aucune aspérité à laquelle s’accrocher. Pour être fidèle aux propos de l’auteur, il multiplie les angles de vues, s’attardant autant sur les parcours douloureux des enfants abandonnés que sur les difficultés de Margaret à conjuguer travail et vie de famille. En résulte, une suite d’aller-retours incessants entre l’Australie et le Royaume-Uni, qui rend l’histoire complexe et porteuse de peu d’émotion. Seule la scène où Jack apprend que sa mère est morte avant même qu’il n’ait pu la retrouver, s’avère bouleversante.
Les maladresses de narration desservent aussi le côté didactique du film. On reste sur sa faim. Une fois sorti de la salle, on est curieux d’en savoir un peu plus sur cet épisode peu glorieux de l’histoire britannique. Les raisons pour lesquelles le gouvernement eu recours à de tels agissements restent floues. Tant d’imperfections semble révéler une certaine appréhension du metteur en scène devant l’ampleur de son sujet. Jusqu’ici réalisateur de séries anglaises reconnues ("Shameless", "Hotel Babylon") Jim Loach aborde le grand écran dans un domaine parfaitement maîtrisé par son père. Nul doute que dans une telle situation, la pression doit monter d’un cran. La barre était trop haute, Jim n’a pas réussi à l’aborder sous le bon angle. Ne tient qu’à lui de tenter un deuxième essai.
Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur