O'CORNO
Une ode à la solidarité féminine
1971, sur une île de Galice. María est contactée par la jeune Louise, qui n’a pas eu ses règles depuis un certain temps. La rumeur dit qu’elle aide non seulement les femmes à accoucher, mais aussi, en secret, à avorter. Maria lui concocte alors une potion, à base de plantes et l’accompagne dans cet acte. Mais peu de temps après, on l’avertit que Louise a été retrouvée morte et alors que la police franquiste est en route pour l’interroger, Maria entreprend de fuir, vers le Portugal…
Grand Prix du Festival de San Sebastian 2023, "O'Corno" arrive sur les écrans français également auréolé du Goya de la meilleure révélation féminine 2024 pour son interprète principale Janet Novás. L’action se situe dans l’Espagne franquiste du début des années 70, où l’avortement est illégal, et va suivre une femme, Maria, qui est habituée à aider les autres femmes, parfois en toute clandestinité, devant fuir vers le Portugal, suite à la mort d’une jeune femme venue la voir pour avorter. Un périple durant lequel, elle va elle-même bénéficié de l’aide d’autres femmes, depuis celle qui lui conseille de fuir, jusqu’à une femme noire habituée à passer la frontière, en passant par une jeune femme muette qui lui indique le chemin ou une autre qui lui propose spontanément de l’héberger. Formant une sorte de chaîne de solidarité, elles expriment toute la force des femmes face à ceux qui tentent de restreindre les leurs.
Mis en scène par Jaione Camborda, dont c'est le second long métrage (après "Arima"), le film s'avère aussi âpre que lumineux. Il s’ouvre d’ailleurs sur une longue scène d’accouchement, où la douleur est mise en avant, les personnes aidant la femme enceinte s’éloignant peu à peu pour laisser seules, la future mère et son aidante. Mettant aussi en avant le caractère « naturel » des gestes, qu’il s’agisse d’accompagner certaines positions, ou de choisir certaines herbes dans un champs de blé pour concocter un breuvage en vue de l’avortement, "O'Corno" aborde son personnage comme quelqu’un d’expérimenté et de libre (voir la très belle scène de fête de village et sa conclusion en jeux d’ombres), qui ne cadre pas avec le contrôle masculin ou autoritaire de l’époque. Soucieux de montrer des existences de femmes difficiles (la réalité du quotidien de la femme noire est particulièrement significative), le film offre cependant un magnifique plan final, en forme de parabole sur l’entraide et la liberté d’aller et venir.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur