NÉ QUELQUE PART
Une histoire personnelle qui nous révèle un bout d’Histoire de l’immigration algérienne
Du jour au lendemain, Farid doit se rendre en Algérie, le pays de ses parents, pour empêcher la destruction de la maison de son père, trop malade pour s’y rendre lui-même. Ce voyage va lui permettre de rencontrer les membres de sa famille restés là-bas, découvrir l’Algérie qu’il ne connait pas, et de troquer, malgré lui, sa vie contre celle qu’il aurait pu avoir si son père n’avait pas traversé la méditerranée avant sa naissance.
Premier film de Mohamed Hamidi, "Né quelque part" raconte l’histoire d’une quête d’identité. Cette comédie dramatique est réussie avec tout le paradoxe que cela sous-entend : elle est drôle, émouvante et grave à la fois. "Né quelque part" est le film qu’il manquait à la nouvelle génération de français, nés de parents immigrés. Enfin, on passe à autre chose, ici pas de vie dans les cités, ni de clichés sur les beurs et autres kaïras… Farid est un jeune français comme tant d’autres qui se retrouve confronté à une histoire familiale et un pays d’origine qu’il avait, jusqu’ici, choisi d’ignorer parce qu’ils étaient bien loin de sa vie quotidienne. Mais le film parle à tous les jeunes adultes qui, un jour, décident de s’interroger sur leurs origines. Qui sont mes parents ? Où et comment ont-ils grandit ? À quoi ont-ils renoncé pour le bonheur de leurs enfants ? Qu’elle aurait été ma vie s’ils n’avaient pas fait ces choix ? Et, naturellement le réalisateur s’est inspiré de sa propre histoire pour évoquer ces interrogations. Enfant d’immigré, il ne savait rien de l’Algérie, son pays d’origine. Le film démarre d’ailleurs avec ce message en voix off « on n’est jamais trop curieux quand il s’agit de sa propre histoire ».
Farid, interprété par Tewfik Jallab (bien retenir son nom !), arrive en Algérie pour sauver une maison construire pierre par pierre par son père lui-même et son oncle… Il pense régler ça en une semaine et reprendre sa vie, ses études, ses exams, ses projets avec sa fiancée française. Mais, là-bas, il rencontre son cousin, joué par Djamel Debbouze, qui le guide dans le pays. Il fera également la connaissance de toute une galerie de personnages pittoresques qui offre les scènes les plus drôles du film, dont l’excellent Fatsah Bouyahmed qui interprète le « réceptionniste ». Farid et son cousin sont du même âge, l’un est né en France et l’autre en Algérie… Dans une des scènes-clés du film, ce cousin explique son rêve de partir vivre en France, et les regrets de n’avoir eu la chance de n’être pas né là-bas lui aussi, alors que c’était son père qui aurait du partir. Un autre « personnage » important du film : le (seul) téléphone du village ! Dont les appels rythment le film !
Ensuite, le film alterne entre humour, grâce notamment aux personnages pittoresques du « bled », et gravité quand Farid perçoit les sacrifices fait par ses parents. Il prend conscience de ce que cela implique de quitter son pays pour sauver sa famille au péril de sa vie.
Chaque scène de "Né quelque part" nous révèle un peu plus l’Histoire de l’immigration algérienne. Enfin, deux couleurs dominent chaque plan : le bleu-turquoise et l’ocre. Le bleu du ciel et de la mer : traits d’union entre l’Algérie et la France ; et l’ocre de la terre, de la peau et de la chaleur. Ça, ajouté au reste, fait de "Né quelque part" est un très beau moment de cinéma.
Loreleï Colin-MoreauEnvoyer un message au rédacteur