MY LOVE AFFAIR WITH MARRIAGE
Accepter son inadéquation aux attentes de la société
Zelma, petite fille passant son enfance au début des années 70 sur l’île russe de Sakhaline, a dès son plus jeune âge su se rebeller face aux garçons. Mais on lui a aussi appris que pour avoir une vie, il faut savoir séduire un homme, et que pour cela, il vaut mieux rester ignorante et soigner ses apparences. Elle devient alors calme et soumise, espérant que l’amour résoudra tous ses problèmes et lui permettra d’être intégrée dans la société…
Récompensé d’une mention du jury au Festival du film d’animation d’Annecy 2022, "My Love Affair with Mariage" est le portrait subjectif de Zelma, dans ses tentatives de relations avec divers hommes. Utilisant diverses techniques, la réalisatrice lettone Signe Baumane utilise l’animation pour mieux représenter les sentiments de son héroïne, et son inadéquation à la société et aux exigences de celle-ci envers les femmes. Utilisant des décors sous forme de maquettes, dans lesquels s’insèrent les personnages dessinés, elle offre une profondeur de champs étonnante à ses divagations, mêlant commentaires personnels, interprétation et symbolique (le face à face avec un trou dans une surface qui ne correspondant pas du tout à son corps, marque la différence à merveille de cette femme qui se cherche).
Partant de son enfance (on la voit initialement à l’âge de 7 ans, courir dans une ferme pour aller nourrir un chat), et mettant en parallèle la conception (une belle idée à base de craie sur tableau noir), le film aborde aussi bien les premières règles que le premier rapport sexuel, avec un « mélange des corps » particulièrement représentatif. Ceci avant d’aborder la question de l’union, au travers de ses relations avec 3 hommes, un artiste anxieux et alcoolique, un mystique capable de violence et un homme efféminé. Autant de sous trajectoires qui questionnent à chaque fois la liberté de la femme, en tant qu’être ou artiste, la jalousie, la domination ou la possession, voire la capacité à laisser partir, le tout sur des fonds culturels différents. Une belle ode à l’indépendance et à l’acceptation de son propre décalage avec une société qui ne résonne que par moules.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur