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MY LIFE DIRECTED BY NICOLAS WINDING REFN

Un film de Liv Corfixen

Chéri fais-moi peur !

Liv Corfixen est la femme du réalisateur Nicolas Winding Refn. Suite au succès planétaire de "Drive" et au Prix de la mise en scène obtenu à Cannes en 2011, le réalisateur se retrouve auréolé d’un statut culte et se lance dans son nouveau projet "Only God Forgives". Pour ce polar situé en Thaïlande, le réalisateur embarque sa propre famille à Bangkok pendant six mois. Mais plus le tournage avance, plus Nicolas semble obsédé par son film au point de délaisser sa famille. Liv le filmera en continu durant ce tournage, utilisant son mari comme sujet d’observation pour une thérapie commune…

Sortie directe en DVD le 26 avril 2016

Qui est réellement Nicolas Winding Refn ? A défaut de donner une réponse précise et de prétendre apporter la paix entre ses fans et ses détracteurs, ce documentaire réalisé par sa propre épouse (déjà aperçue en tant qu’actrice dans le cultissime "Bleeder") permet en tout cas d’englober sérieusement sa démarche d’artiste, injustement assimilable par certains à de l’enjolivure arty là où son approche de l’art se veut exutoire à plus d’un titre. Soit un cinéaste pour qui réaliser un film tient autant du parcours du combattant pour ne jamais se répéter que de l’exutoire personnel pour trouver une issue à ses doutes. L’image finale de "Bronson", à savoir celle d’un être enfermé dans une cage en acier aux allures de cercueil, était déjà suffisamment évocatrice en l’état. En nous faisant partager l’intimité de son époux torturé durant le tournage le plus difficile de sa carrière – à savoir celui d’"Only God Forgives" à Bangkok – et en mettant en avant la faculté du cinéaste à construire son film à l’instinct (quitte à remettre en question chacun de ses choix en cours de route), Liv Corfixen dessine le portrait le plus évocateur qui soit : un artiste torturé entame une partie d'échecs avec lui-même sous l’œil d’une épouse patiente. L’art, cette obsession ? L’art, cette thérapie, surtout…

Le point de départ de ce tournage maladif – qui donnera naissance à un film torturé à plus d’un titre – est pourtant une victoire : le Prix de la mise en scène décerné à "Drive" à la fin du Festival de Cannes en 2011. Sauf qu’une victoire pour un artiste, c’est la certitude de ne plus savoir comment rebondir par la suite, et ainsi le début de l’angoisse. Sur la création d’un film tel qu’"Only God Forgives", riche en perspectives œdipiennes comme en errances mentales sous haute influence de David Lynch et d’Alejandro Jodorowsky, il n’est pas étonnant de découvrir ici un « NWR » anxieux, incertain, isolé, prisonnier de son art, qui cherche dans l’inconnu et dans le « vide » des réponses spirituelles à ses tourments – le grand Jodorowsky met même ici ses cartes de tarot à contribution. Avec, malgré tout, des proches qui le suivent jusqu’au bout du monde et qui, dans les moments les plus difficiles, sont toujours là pour le retenir lorsqu’il s’apprête à couler. Corfixen ne cache rien, cela dit, de l’impulsivité du bonhomme : il faut le voir ici pris d’accès de colère impulsive envers sa femme quand celle-ci, après avoir découvert le montage final d’"Only God Forgives", lui fait part de sa préférence envers un film plus « commercial » tel que l’était "Drive". Le constat final qui en découle rejoint la double définition même de la « passion » : celle qui donne raison au fait de vivre comme celle qui tente d’aller à l’encontre de la raison. L’alliance des deux définitions a toujours donné les meilleurs films. Il faudra désormais admettre qu’elle donne aussi naissance aux cinéastes les plus brillants.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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